La question du cumul des mandats n’est pas anodine contrairement à ce que certains peuvent penser (Avis de Dominique Reynié sur le cumul des mandats) même si elle est sans doute plus une préoccupation de militants que de citoyens : elle est un moyen d’aérer notre vie démocratique.
Elle n’est pas qu’une question de « courage politique » ; il faut comprendre cette « exception française » si on veut progresser, sinon on risque très vite d’en parler plus que d’agir. Elle touche à beaucoup de choses, et sa mise en œuvre doit être bien gérée « politiquement » sauf à se retourner contre la gauche, comme un « piège ». Sa mise en œuvre doit prendre en compte trois séries de considérations:
La première concerne nos institutions. Leur logique pousse au cumul : Le parlement d’abord légifère pour une grande part de son temps pour les collectivités locales : nous ne sommes pas dans un système à l’Allemande ou le Bundestag légifère sur les questions de sa compétence et les Lander légifèrent sur leur compétences. Un Député qui ne connaitrait plus les collectivités locales serait bien vite en conflit avec leur fonctionnement. Par ailleurs qu’en est il d’un Sénat censé représenté les collectivités locales ? A ceci s’ajoute le « millefeuilles institutionnels » qui fait que chaque gros dossier est traité par chaque collectivité : la tentation est alors d’être présent partout pour le faire avancer : sans une plus grande autonomie, sans une plus grande spécialisation des collectivités le ferment du cumul demeure !
La seconde question concerne le statut de l’élu. Un des arguments pour le non cumul est de dire que ces fonctions locales exécutives sont des activités à temps plein. Certes, comment alors les exercer sans statut, sans protection sociale, sans un minimum de garantie de reconversion ! Le risque serait grand alors (c’est déjà trop le cas !) de réserver ces mandats à quelques professions qui le peuvent, à ceux qui peuvent s’appuyer sur un travail dans les partis ou des cabinets de collectivités, voir à ceux qui ont des fortunes personnels !
La troisième question est d’une autre nature, elle concerne la compétition électorale. Quand on va en duel celui qui y va les mains nues a des conditions « moins favorables » ( !) que celui qui y va armé. La compétition électorale s’appuie beaucoup sur la notoriété, qui bien sur encourage le cumul. Il faut donc des règles qui s’appliquent à tous si on ne veut pas s’affaiblir. On le voit bien les scrutins uninominaux ne sont pas de même nature que les scrutins de liste. Un Maire candidat dans un canton dispose de quelques longueurs d’avance par rapport à un citoyen sans mandat !Un Maire candidat pour la troisième fois dispose de quelques appuis par rapport à un nouveau. Attention au désarmement unilatéral !
La mise en place du non cumul ne suppose pas que des discours. Il a ses limites s’il est unilatéral. Ce doit être un projet législatif fort qui implique la réforme de nos institutions et le statut de l’élu, sauf à être un piège aux effets dévastateurs à long terme.
Voir aussi la note de G.Carcassonne publiée chez Télos
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