En France, comme partout en Europe et en Amérique du Nord, l'électorat de la gauche est en mutation. La coalition historique de la gauche centrée sur la classe ouvrière est en déclin. Une nouvelle coalition émerge : "la France de demain", plus jeune, plus diverse, plus féminisée. Un électorat progressiste sur le plan culturel. Une population d'outsiders sur le plan économique, variable d'ajustement face à la crise d'une société qui a décidé de sacrifier ses nouveaux entrants. Il constitue le nouvel électorat "naturel" de la gauche mais il n'est pas majoritaire. Dans ces conditions, quelle stratégie électorale la gauche doit-elle retenir pour 2012 ?
Tel est l'objet du rapport "Gauche : quelle majorité électorale pour 2012?", signé par Olivier Ferrand et Bruno Jeanbart (Synthèse du rapport) . Cet exercice de sociologie électorale, issu d'un groupe de travail de terra Nova a été mené en parallèle dans 9 pays à l'initiative du Center for American progress (Etats-Unis) et de la Fundacion Ideas (Espagne)
Ce premier rapport a suscite un vif débat. Les interrogations qu’il soulève sur les mutations du paysage politique sont bien légitimes. La sortie simultanée de « L'équation gagnante, La gauche peut-elle enfin remporter ? » de Laurent Baumel et François Kalfon, a alimenté ce débat : un article de Thomas Wieder dans le monde constatait que « les classes moyennes partagent les valeurs culturelles de la gauche mais peuvent, pour partie, être en phase avec la droite sur les questions économiques, les classes populaires adhèrent au discours de la gauche sur le plan socio-économique, mais se rapprochent de plus en plus de la droite, voire de l'extrême droite, d'un point de vue culturel. » .
Mais est il encore temps de s’interroger sur ce qu’est « l’électorat de la gauche » : on croit rêver à moins d’un an des Présidentielles . Certains blogueurs de gauche on été très critiques sur ses conclusions .
Mais s’y est greffée aussi une polémique politicienne, instrumentalisée par le secrétaire général de l’UMP, Jean-François Copé, pour qui Terra Nova proposait de «dire adieu » aux classes populaires.
Olivier Ferrand lui a d’abord répondu dans une tribune libre au titre «évocateur « qui défend les classes populaires ? » . Dans deux tribunes parues récemment dans Libération, Olivier Ferrand et Étienne Schweisguth répondent de nouveau aux réactions suscitées par ce rapport. Pour Olivier Ferrand, il n'a jamais été question de "dire adieu" aux classes populaires, mais de reconnaître en leur sein le clivage opposant les classes populaires intégrées, travaillées par la peur du déclassement, et celles subissant le précariat, le chômage ou l'exclusion : Français des quartiers populaires, minorités, jeunes peu qualifiés, femmes en situation précaire. C'est à la gauche de défendre ces nouvelles classes populaires. Selon Étienne Schweisguth, qui rappelle la nature culturelle, et non pas seulement économique, du clivage droite-gauche, c'est également à la gauche d'être suffisamment attractive pour répondre aux attentes économiques et sociales des classes populaires, et les détourner de la voie du repli national.
Une réflexion stimulante mais qui ne doit pas déboucher sur l’impasse ou nous avait conduit le débat sur les « deux gauches » .
Tribune libre de Olivier Ferrand Tribune libre de Etienne Schweisguth •
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