Les allégements et autres exonérations d'impôts accordés par l'Etat coûtent deux fois plus cher qu'on ne le dit et accroissent les injustices : c’est ce qui ressort d’un article intéressant de Thierry Pech dans Alternatives Economiques de septembre 2011.
Les niches fiscales seront au cœur des débats parlementaires de l'automne, lors de l'examen de la prochaine loi de finances. Sur la sellette: quelque 500 mesures dérogatoires qui permettent aux contribuables (souvent les plus aisés) et aux entreprises (souvent les plus grandes) de réduire leurs impôts. Le manque à gagner pour les comptes publics s'élève à 65 milliards d'euros, selon le projet de loi de finances 2011 (PLF), soit un quart des recettes fiscales nettes de l'Etat.
Mais il faut aussi ajouter les niches qui ont été " déclassées ". Derrière cette appellation se cachent de nombreux dispositifs dont on ne tient tout simplement plus compte dans le recensement officiel. Ces mesures volontairement mises de côté restent cependant en vigueur. Au total, depuis 2006, cette technique a permis de soustraire à l'inventaire au moins 80 milliards d'euros de manque à gagner pour l'Etat, soit environ 35 % de ses recettes fiscales nettes.
Si on y ajoute les 65 milliards liés aux niches dûment répertoriées, le coût global pour l'Etat avoisinerait donc 145 milliards d'euros, soit plus de 95 % de son déficit annuel !
Les artifices du déclassement ont en effet accrédité l'idée – fausse – selon laquelle les niches fiscales auraient d'abord une vocation sociale et qu'il serait donc difficilement envisageable de les réduire dans des proportions importantes. Certaines d'entre elles ont effectivement une fonction d'aide aux plus modestes : c'est le cas par exemple de la prime pour l'emploi, un crédit d'impôt dont profitent plus de 8 millions de ménages pour un coût estimé à près de 3 milliards d'euros.
Mais beaucoup de ces niches profitent d'abord aux grandes entreprises, aux hauts revenus et aux gros patrimoines. Si les grandes entreprises ont un taux effectif d'imposition largement inférieur à celui des petites, c'est en effet en bonne partie parce qu'elles jouent des niches fiscales pour optimiser leurs impôts, un sport auquel les PME ont moins aisément accès.
Au final, que l'on s'intéresse aux ménages ou aux entreprises, la règle est à peu près la même : plus on est riche et plus on a les moyens de réduire ses impôts. Cette multiplication de niches, classées ou non, rend le système fiscal illisible. Les taux d'imposition réels, devenus souvent très bas pour les plus aisés, n'ont rien à voir avec les taux affichés, maintenus à un niveau relativement élevé uniquement pour l'affichage politique
Que faire pour sortir de cette situation ? Pour commencer, revenir sur la majorité des déclassements afin de disposer d'un outil de mesure plus fiable des dépenses fiscales. Pour l'heure, la liste officielle ne le permet pas. Ensuite, si l'on veut atteindre à la fois plus de justice sociale et plus d'efficacité budgétaire, il est nécessaire de réduire ces dépenses bien au-delà de la dizaine de milliards d'économies déjà annoncées dans ce domaine pour 2012
Le tableau des plus grosses niches fiscales et leurs bénéficiaires :
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