Mai 23

Développer le dialogue dans l’entreprise, une ambition de gauche !

social_actu77142_photoLa loi Travail a cristallisé beaucoup d’oppositions sur la question du dialogue social dans l’entreprise.

Elle suscite bien des craintes de la part de responsables du Patronat qui y voit un risque de « dilution de leur pouvoir » dans ce qu’ils considèrent comme leur propriété : hors une entreprise, c’est un ensemble complexe qui ne se  résume pas à ses actionnaires.

Mais elle suscite aussi des oppositions chez certains responsables syndicaux qui y voit le risque d’accords qui ne leur plaisent pas,  la perte de certains pouvoirs institutionnels, la perte d’une vision « lutte de classes » de l’action syndicale. N’ayons pas une vision purement idéologique de l’entreprise !

Alors que nombreux à gauche, sont ceux qui plaident pour une « plus grande implication citoyenne » dans la société, pour le développement de la « démocratie participative », pour une utilisation plus fréquente du « référendum », il serait paradoxal que les mêmes freinent le dialogue social dans l’entreprise ! « Citoyens dans la cité, les travailleurs doivent l’être aussi dans leur entreprise, et être acteurs du changement au sein de celle-ci » comme le dit la CGT de SFR..

Certes la culture française est fortement marquée dans tous les domaines par une centralisation qui, si elle a permis une certaine « harmonisation »,  est aujourd’hui porteuse de rigidités et de blocages : il convient de trouver aujourd’hui « un nouvel « équilibre ».

Le dialogue social dans l’entreprise c’est d’abord une meilleure implication des salariés dans ce qui fait  leur vie dans l’entreprise. C’est renforcer la vitalité syndicale, et mieux l’ancrer dans la « réalité de l’entreprise ». Traiter « par le haut », à un niveau plus abstrait, c’est forcément « bureaucratiser » le travail syndical , aussi bien pour les salariés que pour les chefs d’entreprise , le faire porter par des représentants plus éloignés d’eux.

La branche, il faut bien le reconnaître, perd de sa pertinence pour éviter les concurrences déloyales ou le moins disant social ; Elles regroupent des entreprises de tailles très différentes ; les innovations technologiques, les disparités territoriales ou mondiales, créent au sein même des branches une hétérogénéité croissante entre les entreprises. Elle est même parfois le moyen d’empêcher l’émergence de nouveaux concurrents.

L’état doit bien sûr garder son rôle de préservation , de contrôle de ce dialogue et des accords auquel il aboutit. La loi Travail, sans doute maladroitement, essaie d’avancer en ce domaine, en élargissant et favorisant les  accords d’entreprise !

Ce n’est pas nouveau :Il y a  déjà  aujourd’hui plus de 38 000 accords par an, dont beaucoup signés par la CGT et FO pourtant en pointe contre cet aspect. La loi du 4 mai 2004 sur le dialogue social, puis celle du 20 août 2008 sur le temps de travail ou enfin celle du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l’emploi, avaient déjà permis de déroger aux accords de branche.

Des règles sont mises en place pour éviter d’éventuelles dérives : Les dispositions de l’accord d’entreprise ne doivent pas être contraires à ce qui est indiqué dans l’accord de branche. Elles ne peuvent pas non plus être défavorables aux salariés en matière de minima sociaux, protection sociale complémentaire, mutualisation des fonds de la formation professionnelle. Une négociation annuelle  doit être  mise en œuvre sur les salaires, la durée effective et l’organisation du temps de travail,le travail à temps partiel , l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées.

En cas de blocage pour adopter un accord d’entreprise, les syndicats représentant au moins 30% des salariés pourront demander l’organisation d’un référendum. Le vote des salariés, à la majorité des suffrages exprimés, primera sur la décision des syndicats. Pour l’instant, ces référendums ne pouvaient porter que sur certains dossiers (durée du travail, des repos et des congés). Un syndicat ayant obtenu plus de 50% des voix peut donc bloquer un texte, même si la majorité des salariés y est favorable. Avec ce référendum, une entreprise pourra donc contourner le ou les syndicats majoritaire(s), à condition de s’appuyer sur un syndicat pesant au moins 30% des suffrages.

 Enfin une nouveauté de cette loi  est de  donner la possibilité à une entreprise de conclure un « accord de développement de l’emploi ». Une entreprise pourra conclure un accord pour  moduler le temps de travail et la rémunération des salariés afin de partir à la conquête de nouveaux marchés. Cet accord pourra durer jusqu’à deux ans. Aujourd’hui, il est déjà possible de réduire le salaire des employés ou de les faire travailler plus pour un salaire inchangé, mais seulement dans les entreprises qui vont mal : il s’agit des accords de maintien dans l’emploi, qui sont dits « défensifs » car conçus pour éviter les licenciements

Dans les entreprises sans représentation syndicale, les employeurs pourront négocier avec des salariés mandatés par un syndicat représentatif sur tout sujet pouvant faire l’objet d’un accord.

 Sur la durée, dans le contexte de globalisation de l’économie que nous connaissons aujourd’hui, la protection des salariés « par le haut » est de plus en plus fragile, et « délègue » cette protection à des représentants éloignés de la réalité de l’entreprise ; les salariés ont tout intérêt à s’impliquer de plus en plus dans la vie de leur entreprise et c’est tout l’intérêt de « donner du grain à moudre » au dialogue social dans l’entreprise !

Partagez cet article :

Répondre à Décroissant Annuler la réponse

Your email address will not be published.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.