La biodiversité : un enjeu, mondial et local, que l’on évoque pas assez

Lorsqu’ils sont en bon état, les milieux naturels et les espèces nous rendent de nombreux services, par exemple :

  • Des animaux, en particulier des insectes, assurent la pollinisation d’une multitude de végétaux. Sans pollinisation, la plupart des fruits et légumes disparaîtraient des étalages ;
  • Des espèces, comme le ver de terre, contribuent à la fertilité des sols ;
  • Les végétaux, en particulier dans les milieux humides, contribuent à une épuration naturelle de l’eau en y puisant les éléments nécessaires à leur croissance ;
  • Les tourbières sont des puits à carbone (stockage naturel) ;
  • les milieux humides protègent contre l’érosion du littoral, atténuent l’intensité des crues et des inondations… contribuant à lutter contre les effets du changement climatique ;
  • les milieux naturels et les espaces végétalisés dans les villes structurent nos paysages et améliorent notre cadre de vie, nous offrant autant de lieux pour se ressourcer, se promener, s’émerveiller…

La biodiversité fournit ainsi des biens : oxygène, nourriture, médicaments, matières premiers… mais aussi des services : pollinisation, fertilisations des sols, épuration des sols, prévention des inondations

Environ 1,8 million d’espèces différentes ont été décrites sur notre planète, dont 280 000 dans les mers et les océans. Les spécialistes estiment que 5 à 100 millions d’espèces peuplent notre planète alors qu’ils décrivent, chaque année, de l’ordre de 15 000 espèces nouvelles. Le travail de recensement est donc loin d’être terminé.

Dans le même temps, les experts indiquent que la moitié des espèces vivantes pourrait disparaître d’ici un siècle, compte tenu du rythme actuel de leur disparition, 100 à 1000 fois supérieur au taux naturel d’extinction. Certains scientifiques parlent d’ailleurs d’un processus en cours vers une sixième extinction de masse des espèces, la dernière en date étant celle des dinosaures, il y a 65 millions d’années etr toutes les espèces sont concernées : amphibiens, mammifères, oiseaux, insectes, conifères…

Cinq causes majeures d’atteinte à la biodiversité sont identifiées :

  • La destruction et la fragmentation des milieux naturels liées, notamment, à l’urbanisation et au développement des infrastructures de transport ;
  • La surexploitation d’espèces sauvages : surpêche, déforestation, braconnage… ;
  • Les pollutions de l’eau, des sols et de l’air ;
  • L’introduction d’espèces exotiques envahissantes ;
  • Le changement climatique qui peut s’ajouter aux autres causes et les aggraver. Il contribue à modifier les conditions de vie des espèces, les forçant à migrer ou à adapter leur mode de vie, ce que toutes ne sont pas capables de faire.

Le changement climatique affecte la biodiversité, mais à l’inverse, la biodiversité influence directement le climat au niveau local (humidité, température…). Elle agit sur les grands cycles biogéochimiques (eau, CO2, etc.) dont dépend la régulation du climat mondial. Par exemple, les plantes absorbent du CO2 et produisent de l’oxygène : c’est ainsi que certaines régions du monde très riches en biodiversité, comme l’Amazonie, jouent un rôle fondamental dans la régulation du climat

Mais si la question climatique exige une action coordonnée au plan mondial, la question de la biodiversité est plus souvent une action localisée, plus facile à mettre en œuvre, ce qui ne signifie pas qu’elle soit secondaire !

Face à cela a été mise en place en 2012, sous l’égide des Nations unies, La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES). C’est un groupe international d’experts sur la biodiversité, à l’image de ce qu’est le GIEC pour le climat. Elle a pour mission d’assister les 127 gouvernements, qui en sont membres, sur les questions de la biodiversité. Cette interface science-politique, entre les connaissances scientifiques et les décisions publiques, a pour objectifs la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité, sous-tendant le bien-être humain sur le long terme et le développement durable.

Près d’un millier d’experts ont été sélectionnés afin de former des groupes qui travaillent à la préparation des  documents, dont 39 français[]. Les experts sont nommés par les États membres de l’IPBES et les parties prenantes (par exemple, des ONG ou des instituts de recherche)

Les quatre fonctions de l’IPBES sont ainsi de :

  • mener des évaluations sur la biodiversité, les services écosystémiques et leurs interactions aux échelles internationale, régionale et sous-régionale, ainsi que sur des questions thématiques et des sujets nouveaux identifiés par la science ;
  • appuyer l’élaboration et l’exécution des politiques en identifiant des outils et des méthodes appropriés (modèles et scénarios, méthodes d’évaluation, indicateurs…) et en facilitant leur accès ;
  •  identifier et accompagner les besoins de renforcement de capacités (formation, dialogue…) pour améliorer l’interface science-politique, notamment dans les pays du Sud ;
  • faciliter une approche coordonnée de la production de nouvelles connaissances.

L’IPBES s’est réunie pour la seconde fois, en 2018, en plénière pour présenter les bilans de l’évolution de la biodiversité dans les Amériques, l’Asie et le Pacifique, l’Afrique et l’Europe et l’Asie centrale. Les quatre études concluent au déclin de la biodiversité dans toutes les régions du monde.

  • Ainsi, selon le rapport consacré aux Amériques, en l’absence d’une correction de trajectoire, le changement climatique occasionnera les effets négatifs les plus importants avec une perte de la biodiversité qui pourrait atteindre 40% d’ici à 2050.
  • Pour le continent africain, le changement climatique sera la cause d’une perte de plus de la moitié de certaines espèces d’oiseaux et de mammifères d’ici à 2100. L’Afrique compte 1,25 milliard d’habitants et devrait doubler pour atteindre 2,5 milliards d’ici 2050.
  • En Asie-Pacifique, la biodiversité est confrontée à des phénomènes météorologiques extrêmes et à l’élévation du niveau de la mer. cette région doit lutter contre les espèces exotiques envahissantes et l’augmentation des déchets et de la pollution (le “7e continent de plastique”).
  • Pour l’Europe et l’Asie centrale, l’intensité croissante de l’agriculture et de la foresterie conventionnelles sont les facteurs principaux du déclin de la biodiversité. Dans l’Union européenne, 27% des évaluations d’espèces et 66% des évaluations de types d’habitats montrent un “état de conservation défavorable”.

L’engagement de la France pour la protection de la biodiversité est d’autant plus important que :

  • Sur l’ensemble du territoire national, environ 68 000 ha de milieux naturels et terrains agricoles ont été artificialisés chaque année, remplacés par des routes, bâtiments, zones d’activités, parkings… Cela équivaut à un département comme la Loire-Atlantique tous les 10 ans ;
  • La France, qui tient sa diversité spécifique notamment des territoires d’outre-mer, se situe parmi les dix pays abritant le plus grand nombre d’espèces mondialement menacées (soit 1147 espèces, dont 278 dans l’Hexagone) selon la Liste rouge 2017 de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Avec respectivement 526 et 175 espèces menacées, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française arrivent en tête ;
  • Au niveau européen, la France métropolitaine est au 5e rang avec 278 espèces mondialement menacées (scarabée pique-prune, vison d’Europe…) après la Grèce, l’Espagne, l’Italie et le Portugal. Ces quatre pays sont présents en zone méditerranéenne, point chaud de la biodiversité

Pour en savoir plus sur la biodiversité    ou sur les récents rapports de l’IPBES

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