A l’occasion de la fête de l’Europe, la Fondation Schuman a rappelé fort opportunément que le 24 septembre 1952, le conseil des ministres français avait adopté le projet de création d’une Communauté européenne de la santé (CES), proposé par le ministre Paul Ribeyre, qu’il nomme officieusement « pool blanc »
Opportunément car en cette période de pandémie lié au coronavirus , la question du rôle de l’Europe ne manque pas d’être régulièrement posée tant sur le plan sanitaire que bien sur économique.
L’Europe a des compétences dans un certain nombre de domaines limités sur le plan santé, elle coordonne surtout les initiatives des Etats !
Les 12 et 13 décembre 1952, le gouvernement français avait soumis le projet de Communauté européenne de la santé (CES) aux États membres de l’OECE lors d’une conférence préparatoire à Paris, en vue d’un prochain traité qui aurait permis d’adopter formellement le principe d’une Communauté européenne de la santé. C’est Robert Schuman, considéré comme l’un des « pères de l’Europe », qui introduira cette conférence par un discours.
Cette conférence préparatoire débouche sur l’adoption d’une résolution le 13 décembre 1952, laquelle ancre le projet dans la dynamique d’intégration plus globale qui se déploie au même moment dans d’autres secteurs.
Le projet de pool blanc s’aligne donc sur celui par la Communauté européenne du charbon et de l’acier née l’année précédente par la signature du traité de Paris de 1951. Le nom de « pool blanc » faisant d’ailleurs référence à celui de « pool noir » donné à la CECA
Mais la ratification du traité instituant la CED, signé en mai 1952, déchire la classe politique française et brise l’élan de la construction européenne. Le MRP de R. Schuman pousse le projet, comme il avait soutenu la CECA. Mais cette fois le soutien socialiste fait défaut. En outre, les communistes et les gaullistes forment une alliance contre nature contre le projet de CED.
Dernier né des nombreux projets de communauté sectorielle imaginés par le gouvernement français sur le modèle du plan Schuman instituant la CECA, le « pool banc » a donc connu le même sort que le « pool vert » agricole ou la Communauté Européenne de la Défense. Mais contrairement à ces derniers, on n’en trouve quasiment aucune trace dans la mémoire des acteurs collectifs et individuels, dans les documents officiels ou dans la littérature académique. L’explication ne tient probablement au fait que le pool blanc n’a donné jour à aucune institutionnalisation dans le cadre du traité de Rome, et qu’il n’a inspiré aucune des institutions qui gouvernent aujourd’hui l’espace européen (communautaire) de la santé
Alors qu’aujourd’hui se posent de nouveau, plusieurs préoccupations, par exemple :
– Pour le développement de nouveaux programmes de recherche dans le domaine de la santé, impossibles à développer dans un cadre national
– Pour la relocalisation de la production de certains médicaments impossible la encore dans un cadre national mais opportune au niveau Européen
– Pour la création d’une véritable filière européenne de fabrication de matériels sanitaires
– Pour une harmonisation des formations et éviter ainsi que le « numerus clausus » des formations médicales ne conduisent des jeunes français à aller se former en Roumanie, en Espagne ou en Belgique
– ……
Il n’est pas inutile de regarder les raisons de ce premier échec. Alban Davesne et Sébastien Guigner, dans un article de 2013, analyse les raisons complexes de l’abandon du projet : réticences initiales de certains États qui préféraient les cadres de coopération et de coordination existants tels que l’Organisation mondiale de la santé, le Conseil de l’Europe, etc. ; une stratégie française, trop précipitée ; l’opposition supposée de certains groupes pharmaceutiques, inquiet des nouvelles contraintes sanitaires que la CES pourraient engendrer et les enjeux liés aux minima sociaux …. Et puis toujours cette question de la souveraineté nationale et de la mise en œuvre du principe de subsidiarité !
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