Dans une note assez complète de Terra Nova , Thomas Chalumeau présente les caractéristiques du budget 2010 : « Le budget de l’Etat pour 2010 présenté au Conseil des Ministres affiche la plus grave dégradation des finances publiques en France depuis 1974.A 140 milliards d’euros (8.2% du PIB), le déficit budgétaire représente la moitié des dépenses de l’Etat. La crise est bien sûr passée par là. Mais son impact sur les comptes publics est beaucoup plus spectaculaire que lors de la précédente récession de 1993. Il révèle l’ampleur de la destruction du tissu économique en France en cette « année 2009 cauchemar ».
Ce budget est d’abord un budget de crise, qui fait le choix de laisser filer les déficits pour éviter de prolonger la récession. Est-ce pour autant « le meilleur des budgets possibles compte tenu des circonstances » ? Probablement pas. Cinq principales critiques peuvent lui être adressées :
1. La politique de baisses d’impôts menée depuis 2002 a approfondi le déficit structurel de l’Etat de 30 milliards d’euros, soit près de 2 points de PIB. Les seules baisses d’impôts destinées aux contribuables les plus aisés représentent près de 20 milliards d’euros. Ces baisses ont limité d’autant les marges de manoeuvre nécessaires pour une relance conjoncturelle en période de crise. C’est également le cas de la suppression de la taxe professionnelle en 2010, dont le coût aurait été mieux utilisé pour la relance de la consommation des classes moyennes.
2. Cette contrainte fiscale explique en grande partie la faiblesse du plan de relance décidé cette année. Elle explique également l’incapacité du gouvernement d’inscrire un second plan de relance pour 2010, pourtant nécessaire pour juguler le durcissement du chômage et de la crise sociale.
3. Le paquet fiscal est pour l’essentiel confirmé. La fiscalité des ménages restera orientée en 2010 sur l’allégement de la fiscalité du patrimoine et la baisse, ciblée socialement, de l’impôt sur le revenu. De manière symbolique, les diverses mesures « sociales » arrêtées en 2009 – dont les baisses limitées ciblées sur les plus modestes – sont supprimées de ce budget.
4. Les grandes décisions structurelles ont été une nouvelle fois repoussées. Le «verdissement » des finances publiques est entamé avec la taxe carbone mais demeure trop modeste. Les investissements dans les dépenses d’avenir sont laissées à la mission « grand emprunt ». La lutte contre les déficits structurels et le respect de la programmation pluriannuelle 2009-2012 des finances publiques, qui avaient été pourtant confirmés en juin lors du débat d’orientation budgétaire sont mis de côté : le retour des finances publiques sur une trajectoire soutenable est renvoyé à la discussion de la prochaine loi de programmation des finances publiques.
5. La hausse des prélèvements obligatoires pour restaurer les finances publiques est inévitable à terme. A défaut d une réorientation de la politique fiscale, elle risque de frapper une nouvelle fois les classes moyennes (via la hausse des prélèvements locaux et sociaux), hypothéquant, au-delà du problème d’équité, les marges de rebond de l’économie. »
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