Les graves difficultés que connaît le bâtiment pour la construction de logements neufs ont de multiples origines : coût de construction, coût des terrain, disponibilité et coût du foncier, capacité d’emprunt, coût de transaction et de commercialisation,…. J’avais évoqué cette question dans un billet précédent.
Rappelons qu’en moyenne, un logement coûtait 3 800 euros du mètre carré en France en 2011, contre 1 300 euros en Allemagne, un rapport de 1 à 3 ! En 1999, les prix du poste logement (cf. graphique joint sur le Niveau de prix du poste logement dans la consommation des ménages, base 100 = zone euro) étaient, selon Eurostat, supérieurs en Allemagne de 18,3 % à la moyenne de la zone euro (+ 10,6 % en France). En 2011, ils étaient devenus outre-Rhin inférieurs à cette moyenne (contre + 12,5 % en France). L’écart phénoménal qui s’est ainsi creusé en une décennie entre l’Allemagne et le reste de la zone euro sur le plan du coût du logement pour les ménages a sans doute permis de faire passer la pilule de la modération salariale prolongée.
D’où viennent ces écarts de cout :Il est une explication qui apparaît réelle si l’on en croit la récente étude du cabinet Fidal : c’est la fiscalité.
Celui-ci à compare la fiscalité dans différents pays d’Europe pesant sur un logement de 200 000 euros. Elle est presque 3 fois celle pratiqué en Allemagne. La TVA en France est voisine de celle de la Belgique ou des pays bas, mais presque double de celle de l’Allemagne, de l’Italie, de l’Espagne ou du Royaume uni. Mais à la TVA s’ajoutent d’autres taxes ou impôts divers, et le total place la France nettement en tête des principaux pays d’Europe.
Une autre simulation faite par Fidal est éclairante : un Français qui acquiert un appartement de 200000 euros ,loué pendant 10 ans, qui en tire un revenu locatif de 4% par an, avant de le revendre, aura payer 58000 euros d’impôt , soit 32% de plus qu’un britannique et 45% de plus qu’un Allemand.Les seuls éléments pour lesquels le Français ne sera pas pénalisé concerne les plus vagues de cession ou les droits de succession .
Par ailleurs une autre étude fera certainement couler beaucoup d’encre et alimentera bien des débats : selon l’Insee, qui a publié une note d’analyse en ce sens, les aides au logement ont pour conséquence de faire augmenter les loyers.
L’Insee fait le point dans cette étude sur les impacts des trois aides (APL, ALF et ALS, c’est-à-dire aide personnalisée au logement, allocation de logement familiale et allocation de logement sociale), qui représentent aujourd’hui quelque 15,8 milliards d’euros par an – dont la moitié va vers le secteur locatif privé. Ces aides ont fortement augmenté au fil des ans : elles représentaient 3 milliards d’euros constants il y a trente ans, et le nombre de bénéficiaires a quasiment doublé dans la même période, passant de 3 millions à presque 6 millions. Rien n’indique d’ailleurs dans l’étude que cette augmentation soit seulement due à une plus grande générosité de l’État : elle vient aussi en grande partie – crise et chômage de masse oblige – d’un nombre sans cesse croissant de personnes entrant dans les critères du droit à l’aide.
Reste le constat de l’Insee : « Comme (ces aides) permettent à certains ménages d’accéder à des logements de meilleure qualité, la demande s’accentue et peut conduire à une hausse des loyers si le nombre et la qualité des logements ne s’ajustent pas suffisamment. En d’autres termes, une partie du bénéfice de l’allocation des ménages serait alors transférée aux bailleurs. » Ce raisonnement semble confirmé par les chiffres : l’Insee rappelle que les aides au logement ont des taux différents selon les zones géographiques, entre la zone I (région parisienne), la zone II (agglomérations de plus de 100 000 habitants) et la zone III (reste du territoire). L’Insee compare les loyers dans des communes situées juste à la limite des seuils, avec un peu moins de 100 000 et un peu plus de 100 000 habitants, communes dont les niveaux de services, de desserte, etc., sont très comparables. Elle constate qu’en zone II, où les aides sont plus élevées, les loyers le sont aussi. Et pas à la marge : l’Insee avance – tout en restant assez prudente – un chiffre de 5,3 % de « surloyer » en zone II, par rapport à la zone III.Autre constat : les aides au logement ne poussent pas à une augmentation de l’offre.
À peine parue, l’étude de l’Insee suscite déjà de nombreux commentaires, dont ceux de certains économistes qui suggèrent qu’il n’y a plus qu’à « tailler » dans ces aides, pour faire baisser le déficit de l’État et pousser les loyers à la baisse. Sauf que rien ne dit qu’une telle mesure aurait un effet mécanique sur les loyers. De plus, la disparition ou la réduction des aides au logement, en rendant l’accès au logement plus difficile pour des millions de ménages, aurait bien d’autres effets néfastes sur l’économie : la part que les aides au logement permet aux ménages d’économiser peut se reporter sur d’autres secteurs de consommation. Une inversion de la tendance n’aurait pas, loin s’en faut, d’effet positif sur la consommation, et donc sur la croissance. L’Igas (Inspection générale des affaires sociales) appelle d’ailleurs à la plus grande prudence dans toute réflexion sur une réforme des aides au logement, afin de ne pas « mettre les locataires modestes, de plus en plus nombreux, en difficulté ».
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