Ne pas rester sourd ou aveugle face aux cris du monde arabe.

La situation en Lybie et l’attitude de nos démocraties doivent nous interroger. Les réactions des gouvernements européens vis-à-vis des évènements en cours dans le monde arabe sont la marque de démocraties usées et apeurées, paralysées par la dépendance énergétique et des impératifs économiques. L’Europe réagit avec une mentalité de forteresse assiégée

Ils sont empêtrés dans les mensonges ou les mythes que trop de responsables politiques ont eux-mêmes alimentés et auxquels ils ont fini par croire. Le mythe de l’unité du monde arabe et plus généralement de l’Islam, ce qui revient à nier les énormes différences entre les cultures des pays concernés. Le mythe de l’incompatibilité des civilisations, qui, comme le souligne Amartya Sen, réduit nos identités à la seule religion. Le mythe de l’influence d’Al Qaïda et de l’islamisme, exagérée pour mieux justifier la guerre contre le terrorisme.

Zaki Laïdi dans une note pour Télos s’interroge : Faut-il intervenir en Lybie?  .

« La question politique centrale en Libye est de savoir si une intervention extérieure est de nature à hâter la chute du régime. Pour répondre à cette question il faut prendre en considération trois facteurs : la légalité internationale d’une telle intervention au regard du droit, sa légitimité politique aux yeux des opposants du régime de Tripoli et enfin son efficacité opérationnelle….

Et de conclure, trois démarches peuvent être entreprises au service de l’insurrection libyenne : reconnaître officiellement les autorités de Benghazi comme les autorités politiques légitimes de la Libye de manière à signifier au régime de Tripoli que pour la communauté internationale son pouvoir est désormais considéré comme illégitime, apporter le soutien matériel militaire au nouveau pouvoir en place à Benghazi en respectant scrupuleusement ses demandes, rassembler toutes les preuves de crimes de guerre disponibles sur le terrain de manière à pouvoir déférer le jour venu tous les responsables libyens encore en vie devant une juridiction pénale internationale. »

Par ailleurs, une soixantaine d'organisations, parmi lesquelles l'Association nationale pour l'assistance aux frontières des étrangers, l'Association de défense des droits de l'Homme au Maroc et le Collectif suisse pour le droit de rester, ont lancé jeudi dernier un appel à « une Europe de la solidarité et de l'accueil » pour « une intervention solidaire de l'Union européenne » face aux «dizaines de milliers de réfugiés » en provenance de Libye.

Les associations dénoncent le fait que l'UE désire avant tout se protéger contre les flux migratoires et lui reprochent sa désinvolture. Dans ce contexte, les associations lancent leur appel à tous les gouvernements européens pour qu'ils prennent des mesures afin d'assurer l'accueil des réfugiés sur le territoire européen.

Les propositions de cet appel :…

 Nous en appelons solennellement à tous les gouvernements européens, aux instances de l’UE, à tous les partis politiques pour que soient prises, en concertation avec les partenaires du pourtour méditerranéen, les mesures qui s’imposent d’urgence :

-mettre à disposition des avions pour permettre le rapatriement non seulement des nationaux des pays européens mais de tous ceux qui peuvent et veulent rentrer dans leur pays, tels les Égyptiens qui sont actuellement en Tunisie ;

-permettre l’évacuation par air ou par mer, à partir des portions de territoire libyen qui ne sont plus aux mains de Kadhafi, des étrangers bloqués en Libye et dont leurs gouvernements sont dans l’incapacité de les évacuer ;

-prévoir l’accueil, sur le territoire européen, des réfugiés qui ne peuvent rentrer dans leurs pays ;

-mettre en œuvre sans plus attendre le dispositif permettant d’accorder la protection temporaire à tous ceux qui, dans la situation d’urgence où nous sommes, peuvent légitimement s’en prévaloir ;

-mettre un terme aux patrouilles de Frontex qui empêchent l’arrivée des réfugiés par mer ;

Il faut cesser de nourrir la peur des populations européennes en brandissant systématiquement le spectre de l’ « invasion ». Il faut cesser de considérer comme une priorité d’empêcher l’émigration en provenance de territoires troublés. Nous refusons cet égoïsme criminel. Nous voulons une Europe de la solidarité et de l’accueil

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