Près de trois ans après son adoption, la loi Liberté et responsabilité des universités (LRU) du 10 août 2007 continue de susciter de nombreuses inquiétudes dans la communauté universitaire. Présentée comme une des réformes phares du quinquennat, sa mise en application, non dénuée de choix purement idéologiques, conduit à s’interroger sur les risques qu’elle comporte, notamment à l’aune des résultats des autres pays industrialisés qui ont rendu leurs universités largement autonomes bien avant la France. C’est le travail que font Giuseppe Longo, directeur de recherche (CNRS, ENS) et Achille Diop dans une note pour Terra Nova
Le concept d’autonomie, notamment en matière d’enseignement, est historiquement une valeur progressiste : laisser l’institution universitaire définir ses orientations loin des pressions politiques ou religieuses, permettre à la recherche universitaire de s’affranchir des pressions économiques et financières accordent la priorité à la liberté de penser, de créer et d’enseigner sur la tyrannie du court terme.
Cette vision n’entre d’ailleurs pas en contradiction avec la nécessité pour le système d’enseignement supérieur et de recherche d’être orienté et régulé par la puissance publique garante de l’intérêt général. Seulement, les mesures issues de la réforme en cours mettent progressivement en œuvre un projet néolibéral et utilitariste pour l’enseignement supérieur français avec , entre autres, une course effrénée au productivisme – publier plus pour gagner plus, « publish or perish » –, la disparition programmée des petites universités victimes de la concurrence, une primauté absolue donnée aux projets d’innovation au détriment de la recherche fondamentale et d’un champ précis en particulier destinées à une mort lente parce que perçu comme peu rentable : les sciences humaines et sociales.
La gauche doit défendre une autre vision de l’autonomie et construire un projet de réorientation radicale de la réforme en cours :
– rééquilibrer la gouvernance des universités par la création au sein de chacune d’elles d’un Sénat académique ;
– concilier l’émergence de grands campus internationaux avec le maintien d’universités de taille moyenne au cœur de la mission de démocratisation de l’enseignement supérieur ;
– réaffirmer le caractère national du statut de l’enseignant-chercheur et faciliter la mobilité de ceux-ci sur le territoire et au niveau international, en particulier européen ;
– mettre en place un plan de rattrapage financier sur le long terme pour amplifier et pérenniser l’effort budgétaire amorcé depuis 2008.
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