La désindustrialisation est généralement attribuée soit à la concurrence des pays à bas salaires et donc au coût excessif du travail, soit à l’insuffisance des investissements innovants et donc au défaut de compétitivité hors-prix.
Les solutions recherchées, relevant de politiques publiques, oscillent entre la baisse des coûts salariaux et le soutien à la R&D, le plus souvent sans se préoccuper des conditions de gouvernance des entreprises. L’accent est mis sur le fonctionnement des marchés de travail que l’on voudrait rendre plus flexibles et sur celui des marchés financiers que l’on juge ou souhaite efficients, sans véritablement prendre en considération la vraie nature de l’entreprise.
Or pour Jean-Luc Gaffard, dans une note de l’OFCE, celle-ci s’inscrit dans un réseau complexe de relations entre les différentes parties prenantes que sont les managers, les salariés, les banquiers, les clients et les fournisseurs. Ces relations ne sont pas réductibles à des relations de marché grevées d’imperfections qui produiraient de mauvaises incitations et qu’il faudrait corriger pour aller vers plus de flexibilité. Elles participent d’engagements contractuels à plus ou moins long terme souscrits entre les différentes parties prenantes dans l’entreprise, qui dérogent à l’état de pure concurrence, alors même qu’ils sont essentiels à la réalisation des investissements longs porteurs d’innovation et de croissance. De la durée de ces engagements dépendent, en effet, la performance moyenne des entreprises, la structuration de l’industrie et finalement l’industrialisation de l’économie.
La thèse qui sera défendue ici est que la désindustrialisation est la conséquence d’un environnement institutionnel et organisationnel devenu un obstacle à l’innovation et à la croissance en entraînant un recul de l’engagement à moyen et long terme de toutes les parties prenantes dans l’entreprise, les actionnaires et les prêteurs, les salariés, les clients et les fournisseurs.
Le drame national tient à l’affaiblissement des formes traditionnellement mises en œuvre sans qu’il en soit créé de nouvelles.
L’industrie est ici définie, non comme un secteur particulier, mais comme la forme d’organisation de l’activité qui permet de maîtriser les contraintes de ressources financières et humaines associées à la durée de gestation des investissements et à la durée d’acquisition de l’information de marché, rendant crédible et efficace d’innover.
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