Pourquoi la réforme territoriale est mal partie?

2140600840Je pense d’abord qu’elle repose sur quelques fondements erronés.

Le premier et, peut-être le plus important est la recherche permanente de la grande taille dont j’ai souvent évoqué ici les effets pervers : perte de responsabilité, coûts cachés, assèchement démocratique, perte de repères…. Fusion de régions, métropoles …. En sont les aspects les plus récents. Il n’y a pas de taille administrative qui puisse porter tous les problèmes .Et comme le dit Jacques Lévy, Professeur à l’école polytechnique de Lausanne : « La taille des régions est un faux problème….Ce sont même les plus vastes d’Europe, après l’Espagne ! En fait, la taille n’est pas le bon critère. Ce qui leur manque, ce sont des compétences et des moyens».

Le second relève d’une vision jacobine, voir technocratique de la décentralisation et de la gestion des territoires ; on sait ce qui est bon pour eux à Paris, alors qu’un projet de territoire c’est d’abord un projet partage et non un projet impose: partagée dans les compétences transférées, partagée dans les décisions prises, partagée dans les calendriers de mise en œuvre, partagée dans les réorganisations … !

Le troisième relève d’une position de Principe ou les collectivités seraient mal gérées, dispendieuses, alors que la dette relève d’abord et surtout de l’Etat. Faut-il rappeler ici l’engagement n°54 de François Hollande pendant la campagne de 2012 : “Un pacte de confiance et de solidarité́ sera conclu entre l’État et les collectivités locales garantissant le niveau des dotations à leur niveau actuel. ” !
N’est-il pas temps de s’apercevoir que notre exception institutionnelle est aussi liée à une histoire et à une géographie qui fait de notre pays un pays étendue dont il faut gérer la diversité des paysages et des densités.

RFORME~1C’est une réforme dont on ne perçoit pas le sens !

On veut simplifier le mille-feuille territoriale, mais on a réintroduit la compétence générale pour toutes les collectivités ; mais on crée une nouvelle forme d’intercommunalité avec les métropoles ; Les multiples revirements sur le devenir des conseils généraux conduisent aujourd’hui à trois types de départements au lieu de un : les départements ruraux , les départements à intercommunalités fortes , les départements à métropole ! On n’évoque pas l’organisation et le rôle de l’Etat, pourtant source de confusions, de doublons avec les collectivités.

On veut faire des économies mais les fusions de régions vont être coûteuses avec l’harmonisation des politiques publiques, ou des statuts des personnels, qui se fera à marche forcée et donc “par le haut”, auxquels s’ajouteront des déplacements accrus. On multiplie les normes coûteuses, les injonctions de l’Etat vis à vis des collectivités locales dont l’épisode des rythmes scolaires est, après bien d’autres, l’illustration la plus notoire.

Le renforcement de la démocratie et des libertés locales prévue dans l’engagement 54 ne se traduit par rien de significatif si ce n’est le retour d’une certaine forme de centralisation et de décisions technocratiques imposées de Paris. Dans le contexte politique actuel, est il opportun de bouleverser des territoires qui sont des points de repère connus pour les catégories sociales les plus fragiles ? Est ce le moment d’accroitre la distance entre les élus et les citoyens, alors qu’ils contestent un pouvoir politique éloigné, qui ne les écoute pas ?

La méthode utilisée , à marche forcée , est loin des expérimentations attendues, ou de la prise en compte de la diversité des territoires.

En touchant à tout, en multipliant les annonces, en changeant de cap en permanence faute d’évaluation préalable suffisante ou de concertation, on crée de l’incertitude, de la défiance, qui empêche l’engagement de projets nouveaux.

Cette réforme n’est pas opportune dans la conjoncture actuelle, car Il est difficile de demander aux collectivités locales de dégager des marges pour réduire la dette, d’investir, et en même temps , de créer le brouillard sur leurs périmètres d’intervention ou leurs compétences : la priorité devrait être l’emploi et l’investissement pour des acteurs qui représente 70% de l’investissement public. Clarifier les compétences (sur la compétence générale, l’intérêt communautaire..) pour que chacun utilise pleinement ses compétences, et investisse, devrait être le seul et unique objectif !

À la grande taille, je préfère la démarche en réseau; à la fusion je préfère la coopération; à la démarche imposée je préfère la démarche partagée.

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2 Commentaires

    • Guermond Yves sur novembre 3, 2014 à 11:35 am
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    A force de dire tout et son contraire, on ne comprend plus rien. Qu’on en juge :
    – des régions trop grandes ? Il y a peu le président de Haute-Normandie voulait qu’on ajoute encore la Picardie à l’ensemble normand…
    – les idées de Jacques Lévy : une grande région parisienne englobant toute la Normandie…
    – une réforme inopportune : dans le climat actuel tout est qualifié d’inopportun : le contournement Est de Rouen, Notre-Dame des Landes, la limitation des allocations familiales pour les hauts revenus. Faut-il verser de l’eau au moulin de la crise actuelle de l’autorité politique ?
    Ne vaudrait-il pas mieux discuter tranquillement de chaque question thème par thème, en évitant les effets d’annonce.?

    1. Je suppose que ce n’est pas à moi que s’adresse ce commentaire car j’ai une certaine constance dans mes positions sur ce sujet !
      je ne connais pas les idées de Jacques Lévy : j’ai simplement évoqué un de ses propos!
      sur le caractère innoportun de la réforme, je persiste : tous les projets sont bloqués, les collectivités paralysées car ignorent tout de leur devenir en terme de périmètre, compétences… Dans la période ce n’est pas le meilleur moyen de relancer l’investissement public !
      Quand à discuter transquillement je ne demande que cela, avec le temps d’évaluer, mais tout est évoqué , les positions changent chaque jour : il n’a qu’à voir ce qu’il en est des départements!

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