L’article 13 du projet de loi Sapin 2, adopté par l’Assemblée nationale définit les « représentants d’intérêt » (lobbys), mais considère une association d’élus comme l’Association des Maires de France comme un lobby ; c’est « incompréhensible », vu le rôle « d’utilité publique » et le « pluralisme » de l’association.
Le projet de loi contient par ailleurs de très nombreuses mesures positives (plus d’une soixantaine d’articles) allant de la protection des lanceurs d’alertes à des mesures concernant les entreprises, en passant par les marchés publics.
Les « représentants d’intérêts » – les lobbies – sont définis comme « les personnes morales de droit privé (…) dont l’activité principale ou accessoire a pour finalité d’influer (…) sur l’élaboration d’une loi ou d’un acte réglementaire ». Ces représentants d’intérêts devraient, aux termes de la loi, être listés dans un « répertoire national » et feraient l’objet de contrôles accrus et devraient rendre compte régulièrement de leurs rencontres avec des représentants du gouvernement, du Parlement, de l’administration, des organismes publics, etc.
Plus généralement ce projet de loi Sapin 2 fait entrer les associations, y compris les associations d’utilité publique, et donc les associations d’élus, dans le champ des « représentants d’intérêt » (lobbys), alors que les partis politiques et les organisations syndicales en sont exclus, sans qu’on discerne ce qui sur le fond les place dans une situation différente des associations d’élus . Ce choix est-il justifié ?
L’AMF, association d’élus, représente l’écrasante majorité des maires et présidents d’intercommunalité de notre pays, dans toute leur diversité. Sa vocation est de porter auprès des pouvoirs publics les préoccupations d’intérêt général des collectivités qu’ils administrent suite à leur élection au suffrage universel.
Débattre des finances publiques, de la réforme territoriale, de l’accès aux soins, de l’aménagement rural, de l’accueil des migrants ou des territoires connectés, en représentant des collectivités locales n’ est pas la marque d’un « lobby » privé . Signer avec le Premier ministre et les ministres chargés de l’Intérieur et de la Ville une convention pour conjuguer les efforts de l’État et des maires pour mieux détecter et prévenir les phénomènes de radicalisation ne serait pas d’intérêt public?
L’AMF est une association centenaire et sa reconnaissance d’utilité publique induit qu’elle est plus contrôlée que quiconque. Toute modification de ses statuts doit être approuvée par arrêté ministériel après avis du Conseil d’État. Ses comptes sont publics, tout comme le nombre de ses adhérents. Ses débats sont ouverts à la presse.
Si, contrairement aux organisations politiques, patronales et syndicales, l’AMF devait être considérée comme un lobby, cela entrainerait beaucoup de formalités administratives à accomplir mais surtout de nombreuses absurdités à gérer : par exemple, il faudrait à chaque fois dire si le maire de telle ville qui rencontre un parlementaire le fait en tant que représentant de sa ville ou de l’AMF, voire découper son temps de parole ! Quel serait le statut des élus siégeant dans commissions et instances nationales, régionales ou départementales, pour représenter les communes?
Les parlementaires, au lieu de craindre ces associations, devraient considérer que c’est vraiment une chance pour les pouvoirs publics de pouvoir dialoguer, en toute transparence, avec une institution certes exigeante mais pleinement responsable, loyale et transparente.
Nous espérons que le texte final reconnaitra le rôle d’intérêt général des associations d’élus. L’AMF a envoyé une lettre au Premier ministre a pour lui demander que les associations d’élus ne soient pas considérées comme des « lobbies privés », avant le passage de la loi devant la commission mixte paritaire Assemblée-Sénat.
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