Oct 27

La fusion des universités : une mode très technocratique à combattre

photo-amphi-universite-1-630x0La mode est à la fusion : fusion des régions , fusion des communes, fusion des hôpitaux … Il n’y a aucune raison pour que les universités échappent à ce qui devient LA pensée unique. Bien sûr qu’il faut coopérer, mutualiser, fonctionner en réseau , mais pourquoi la fusion ? c’est une mode qui doit être combattue quand elle devient le fil conducteur qui doit s’imposer à tous.

Il fut un temps où l’on privilégiait les territoires, ou le programme Université 2000 donnait une vraie priorité au développement universitaire . Je l’ai vécu comme chargé par le Premier Ministre de préparer la création de l’université du Havre. Je l’ai vécu comme Président de l’université de Rouen en refusant , pour garder une totale pluridisciplinarité, la partition de l’université en deux : Rouen1 et Rouen2. Le paradoxe est qu’actuellement, si cela avait été fait, on gérerait une fusion qui serait dans l’air du temps.

Aujourd’hui, retour en arrière, on veut tout concentrer : logique très jacobine encouragée par l’illusion d’un meilleur contrôle des finances publiques , et le Programme d’Investissement d’Avenir, dont on voit mal d’ailleurs la légitimité sur cette question ! Mais on se garde bien de toucher à cette spécificité hélas propre à la France , de la coupure entre grandes écoles et universités !

Pourtant l’autonomie des Universités a été une réelle avancée pour que puissent être conduits de vrais projets de développement d’enseignement et de recherche.

Alors qu’on célèbre les anniversaires de leur récente création (Rouen , 1966, et Le Havre, 1984), certains voudraient pousser à la fusion des 3 universités de Caen, Rouen, et Le Havre. Quel retour en arrière pour nos territoires, nos étudiants ! L’universté doit être insérée dans un territoire mais ne pas s’y enfermer car le savoir est universel.

Les arguments sont assez peu pertinents :

–          Obtenir une visibilité internationale : comme si les universités chinoises avec leurs plusieurs centaines de milliers d’étudiants étaient plus visibles ! Comme si on voulait fusionner Oxford et Cambridge, pourtant distantes d’à peine 160 km ! C’est ignorer que les 10 premières universités du classement de Shanghai ont toutes moins de 25000 étudiants.

–          De trop gros établissements perdront en réactivité ou en capacité d’innovation : Il fut un temps où les mêmes décriaient le « mammouth », difficile à faire évoluer !

–          De trop gros établissements poseront rapidement la question du fonctionnement démocratique , ou du contrôle des dépenses ! Ils favoriseront le cloisonnement accru des disciplines ou des services.

–          Les distances entre les 3 villes en outre ne facilitent pas les déplacements comme cela peut l’ être au sein d’une métropole.

–          Les fusions , c’est beaucoup de temps perdu dans le meccano institutionnel ou juridique, au détriment des services rendus

On oublie que la productivité dans les services n’augmentent avec la taille, comme dans l’industrie.

Quel que soit la taille , l’ouverture vers l’extérieur , vers d’autres établissements est indispensable pour des coopérations efficaces pour la recherche, pour mutualiser des équipements, pour développer des programmes de recherche cohérents.

Il serait temps de parler projet, plus que de périmètre institutionnel, de favoriser l’initiative et l’innovation plus que d’étouffement bureaucratique .

Il faut parler réseau plus que fusion , favoriser les assemblages stratégiques et les faire évoluer en permanence . La Région peut y contribuer , et nous l’avions fait avec la mise en place des grands réseaux de recherche. Arrêtons de faire grandir les périmètres , vieille quête de puissance d’origine féodale .

 

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