Il existe un débat parfaitement respectable entre pro et anti européens, autour de l’étendue exacte de la souveraineté dans un monde de coopérations. Il a été tranché en Angleterre avec le Brexit, en Allemagne avec la grande coalition, en France avec la victoire de Macron face à Le Pen…Qu’en sera-t-il en Italie ? Les difficultés de l’économie Italienne, homme malade de l’Europe, semble avoir eu raison provisoirement de son ressort démocratique.
L’accord entre la Ligue “très à droite”, et le Mouvement 5 étoiles « très ailleurs » prévoit bien sûr comme tout le monde, la renégociation des Traités européens mais hésite sur la sortie de l’Euro : tantôt c’est oui, tantôt c’est non !
La ligue du Nord est depuis longtemps un mouvement xénophobe, opposé aux étrangers auxquels elle joint les Italiens du Sud. Son chef de file Matteo Salvini a cherché à se recentrer avec cette coalition, mais les symboles vont vite revenir !
Le Mouvement 5 étoiles est « inclassable », « antisystème ». A sa création, nombre de ses représentants étaient issus de la gauche. Il s’est construit en affirmant que l’Union européenne ne défend pas l’intérêt de l’Italie. Ses députés européens se sont finalement inscrit dans un groupe des eurosceptiques nationalistes et le suivi de leurs votes au Parlement européen les classe plutôt à droite.
Faire défaut sur les 250 milliards de dette publique italienne détenus par la BCE, est un acte qu’on ne fait qu’une fois ! et après ? Le pays ne peut plus, après, emprunter sur les marchés à des coûts raisonnables. Croire que l’on pourra emprunter à nouveau après avoir refusé d’assumer sa dette est le comble de la bêtise !
Quelle crédibilité peut avoir un gouvernement qui promet à la fois une baisse massive des impôts (marotte de la Ligue) et une forte hausse des dépenses publiques (demande des 5 étoiles). La décision de refuser l’austérité, une simplification fiscale via une “flat tax”, un revenu de citoyenneté (à hauteur de 780 euros par mois), la baisse de l’âge de la retraite, la lutte contre la corruption ou encore la volonté d’ouvrir des partenariats avec la Russie, sont autant d’incroyables propositions.
Le renvoi de 500000 migrants est lourd de conséquences comme l’idée d’insérer une clause anti-francs-maçons pour les membres du gouvernement qui « rappelle les lois fascistes que les francs-maçons ont toujours dénoncé et qui représentent les conséquences d’une dérive liberticide dangereuse”, assure le Grand Orient dans un communiqué.
La plus grande inquiétude que peuvent avoir les Européens provient de la zone d’imprévisibilité ouverte par l’arrivée de cette coalition au pouvoir. Une coalition hétéroclite de variantes populistes
Nous payons aujourd’hui l’absence de ce qui aurait dû être le « ciment » de l’Europe : la solidarité ! Nous payons l’absence d’une politique européenne d’accueil des réfugiés laissant à l’Italie une charge impossible ! Mais un Italexit serait aussi un échec terrible pour l’Italie !
Giuseppe Conte, professeur de droit, inconnu du grand public, a été désigné par les antisystème pour prendre la tête du premier gouvernement populiste en Italie : Le président Mattarella doit maintenant approuver ou non le nom qui lui est proposé, car c’est le président de la République qui a seul le pouvoir de désigner le prochain chef du gouvernement puis, sur proposition de ce dernier, de nommer ses ministres.
Nous assistons à la fois à un basculement historique national et à un glissement de la démocratie au cœur de l’Europe, qui ne peut laisser indifférents tous les Européens !
3 Commentaires
Si cette Europe n’est pas un échec….alors c’est quoi ?
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C’est un échec pour certains aspects et pas pour d’autres : cela fait tout de même 70 ans qu’il n’y a pas eu de guerres dans l’union européenne, et ce n’était pas arrivé depuis une éternité !!!!
Il y a une certaine similitude entre l’entre-deux-guerres et la période libérale décomplexée actuelle : le ressenti de l’augmentation constante des inégalités et de l’exigence du toujours plus des puissants semble conduire inexorablement à l’émergence de mouvements populistes fascisants. Un président de l’Union Européenne symbolisant le cynisme fiscal ou le pantouflage d’un Barroso chez Goldman Sax qui a délibérément truqué les comptes de la Grèce pour permettre son intégration, sont les plus sûrs garants de l’enterrement d’une certaine idée européenne. Il conviendrait dorénavant de parler de « désintégration » européenne.