Fonds européens : leur gestion en France doit être complètement revue

Les fonds européens n’ont pas fait l’objet d’intenses débats au cours de la campagne des européennes : et pourtant, ils sont très importants pour notre pays mais la France fait figure de mauvais élève dans leur utilisation par rapport, par exemple, à des pays comme la Grande Bretagne ou l’Espagne.

Ce qui est mis souvent à tort sur le compte d’une bureaucratie européenne n’est qu’une mauvaise gestion des fonds publics en France, une utilisation parfois de ces fonds  comme trésorerie, par l’État ou les collectivités

la Cour des comptes dans un rapport, présenté à l’Assemblée nationale, et que rapporte l’AMF,a fait le bilan, cinq ans après son entrée en vigueur, « du transfert aux régions de la gestion des fonds européens structurels et d’investissement (Fesi) ».

 Écrite ainsi, cette mesure, instituée par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (Maptam) du 27 janvier 2014, peut porter à confusion : dans les faits, le transfert de la gestion de ces fonds aux régions, effectif après le début de la programmation 2014-2020 « en raison de négociations fort complexes entre l’État et les régions », s’est révélé seulement « partiel ». L’État gardant la main sur un certain nombre de prérogatives.

« Complexe », cette gestion doit être « améliorée », estime à présent la Cour des comptes, sous peine de « risque important de perte d’efficience dans la gestion des fonds européens ». L’enjeu est d’importance : à la fin de la période 2014-2020, la France aura reçu près de 27 milliards d’euros de fonds européens.

Les Fesi englobent quatre acronymes bien connus des collectivités : il s’agit du fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), du fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (Feamp), du fonds européen de développement régional (Feder) et du fonds social européen (FSE). Sur ces quatre fonds, « seul le transfert en quasi-totalité du Feder aux régions, qui en géraient déjà une large partie par délégation auparavant, a été simple à concrétiser », observe la Cour.

Pour les autres, à chaque fonds sa gestion, pourrait-on résumer. « Le FSE a été scindé en trois tiers : la politique de l’emploi reste l’apanage de l’État, l’inclusion sociale celui des départements et, la formation professionnelle et l’apprentissage relevant des régions (…), le Feamp reste géré par l’État (…) Quant au Feader, le transfert de la gestion de 90 % de ses crédits (10,3 milliards d’euros sur 11,4 milliards d’euros) aux régions n’est qu’apparent, puisque, dans les faits, le ministère de l’Agriculture conserve la maîtrise d’importants leviers de gestion (fixation d’un cadre national, gestion des dossiers relatifs aux indemnités compensatoires de handicaps naturels…) ».

La Cour déplore cet « enchevêtrement de compétences », surtout dans le cas du Feader. Si « fin 2018, la France a engagé 61 % des Fesi qui lui ont été attribués, taux proche de la moyenne européenne de 65,6 %, et payé aux bénéficiaires 35 % des montants, la moyenne européenne étant de 27,7 % » (…) elle « est en retard pour les paiements du Feader » : ces délais ont été « particulièrement longs » dans les années 2015-2017.

Au vu de ces éléments, la gestion du Feader « ne peut pas demeurer en l’état », avertit la Cour, qui propose trois scénarios pour déterminer la nouvelle architecture de gestion du Feader « au plus tard en juin 2019 » : « une autorité de gestion unique », « un statu quo amélioré, intégrant une réforme du cadre national du Feader » ou « une nouvelle répartition des compétences entre les régions et l’État (…) Ce dernier scénario revient à confier à l’État la gestion d’un peu plus de la moitié du Feader (55 %) ». Sans surprise, les régions seraient hostiles à cette hypothèse. « L’esprit de coopération doit primer sur l’esprit de confrontation » entre l’État et les régions, tempère la Cour des comptes. La future agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) devrait constituer un lieu de concertation constructive entre l’État et les collectivités territoriales et [contrairement au Commissariat général à l’égalité des territoires aujourd’hui] assurer une réelle coordination inter-fonds ».

 En plus de cette répartition des rôles parfois « peu lisible », d’autres difficultés ont perturbé la mise en œuvre du transfert de la gestion des fonds européens : en effet, « nombre d’emplois transférés de l’État aux régions étaient vacants », obligeant ces dernières à recruter, et « les systèmes d’information et de gestion, qui relèvent de la compétence de l’État, n’ont pas été adaptés au transfert de la gestion des Fesi aux régions ».

La cour des comptes fait Sept recommandations : À présent, la Cour des comptes demande aux acteurs « d’anticiper » au mieux la prochaine programmation des Fesi prévue le 1er janvier 2021. Elle livre sept recommandations « visant à rationaliser la programmation des fonds, à favoriser la mise en place de guichets communs à l’État et aux régions pour les bénéficiaires des fonds, à simplifier la gestion, à préparer les systèmes d’information (remplacer Osiris et interfacer tous les systèmes d’information des Fesi avec ceux des autorités de gestion et de la Commission européenne), et à améliorer le suivi des flux financiers et à en sécuriser l’utilisation ».

Télécharger le rapport de la Cour des comptes.

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