Dans sa dernière version adoptée ces jours-ci, les paradis fiscaux ciblés par l’Union européenne sont au nombre de 12. Figurent ainsi sur la liste européenne des “juridictions fiscales non coopératives” (liste noire):
- Fidji (Océanie)
- Guam (Océanie, territoire des Etats-Unis)
- Îles Caïmans (Caraïbes, territoire du Royaume-Uni)
- Îles Vierges américaines (Caraïbes, territoire des Etats-Unis)
- Oman (péninsule arabique)
- Palaos (Océanie)
- Panama (Amérique centrale)
- Samoa (Océanie)
- Samoa américaines (Océanie, territoire des Etats-Unis)
- Seychelles (océan indien)
- Trinité-et-Tobago (Caraïbes)
- Vanuatu (Océanie)
Ceux-ci ont, d’après la Commission européenne, refusé d’engager un dialogue avec l’Union européenne ou de remédier à leurs manquements en matière de bonne gouvernance fiscale.
Les Îles Caïmans, Palaos et les Seychelles ont été déplacés de la liste grise à la liste noire car, les engagements fiscaux qu’ils ont pris vis-à-vis de l’Union européenne n’ont pas été honorés
13 autres figurent sur une liste “grise”, ou liste de surveillance : leurs engagements sont jugés suffisants par l’Union européenne, mais leur mise en œuvre fait l’objet d’un suivi attentif. Il s’agit de : Anguilla, Australie, Bosnie-Herzégovine, Botswana, Eswatini, Jordanie, Maldives, Maroc, Mongolie, Namibie, Sainte-Lucie, Thaïlande et Turquie.
Mongolie, Namibie, Sainte-Lucie, qui étaient en 2017 en liste noire ont été depuis déplacés vers la liste grise du fait des engagements qu’ils ont pris.
L’objectif de ces listes est, selon l’UE, “d’améliorer la bonne gouvernance en matière fiscale à l’échelle mondiale” et de “veiller à ce que les partenaires internationaux de l’UE respectent les mêmes normes que les États membres”.
La liste noire est désormais assortie de sanctions : les crédits issus de certains instruments financiers européens (Fonds européen pour le développement durable, Fonds européen pour les investissements stratégiques et mandat de prêt extérieur) ne peuvent pas transiter par des entités établies dans les territoires inscrits sur la liste.
La Commission européenne a proposé de lier cette liste à d’autres mesures (par exemple, des obligations de déclaration plus strictes pour les multinationales qui exercent leurs activités dans des juridictions inscrites sur la liste).
Trois critères ont été retenus pour identifier les juridictions non coopératives :
- Manque de transparence : le territoire ne respecte pas certaines normes (internationales, OCDE ou accords bilatéraux avec les Etats membres) en matière d’échange d’informations, automatique ou sur demande. Par exemple, il refuse de transmettre des renseignements bancaires jugés pertinents à l’administration d’un autre pays.
- Concurrence fiscale déloyale : le territoire dispose de régimes fiscaux dommageables, à l’encontre des principes du code de conduite de l’UE ou du Forum de l’OCDE sur les pratiques fiscales dommageables. Il peut s’agir notamment de facilités fiscales réservées aux non-résidents ou d’incitations fiscales en faveur d’activités qui n’ont pas trait à l’économie locale.
- Mise en oeuvre des mesures BEPS : le pays ne s’est pas engagé à appliquer les normes minimales de l’OCDE pour lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS). Par exemple, le taux d’imposition sur les sociétés y est si bas qu’il conduit des multinationales à y transférer artificiellement leurs bénéfices, sans que ces entreprises y réalisent des activités économiques suffisantes.
Le fait qu’aucun Etat membre de l’UE ne figure dans ces listes n’a pas manqué d’être remarqué. Selon de nombreuses organisations, à l’instar d’Oxfam, plusieurs pays européens – l’Irlande, le Luxembourg, Malte et les Pays-Bas – devraient s’y trouver. Ces Etats ont en effet été à de nombreuses reprises cités dans les LuxLeaks, Panama Papers et Paradise Papers pour leurs pratiques fiscales agressives et anticoncurrentielles.
Les ministres européens, qui devaient se prononcer à l’unanimité, ne les ont toutefois pas ajoutés à leurs listes, arguant que celles-ci étaient des outils destinés à faire face aux menaces externes, et que les Etats membres respectaient les trois critères choisis.
Par ailleurs, plusieurs pays européens étroitement associés à l’UE, comme Monaco, Andorre ou le Liechtenstein, ne font pas non plus partie des listes noire et grise… De manière générale, pour de nombreux observateurs, celles-ci sont trop limitées.
Cette liste est régulièrement mise à jour : en mars 2019, 21 territoires des territoires initialement placés dans la liste grise l’ont quittée : Bahreïn, Corée du Sud, Grenade, Groenland, Guernesey, Hong Kong, Île de Man, Îles Féroé, Îles Turques-et-Caïques, Jamaïque, Jersey, Macao, Malaisie, Montserrat, Nouvelle-Calédonie, Panama, Qatar, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Taïwan, Tunisie et Uruguay. En mai 2019, les Barbades et les Bermudes ont fait de même. En octobre 2019, cinq territoires ont à nouveau quitté la liste grise : Albanie, Costa Rica, Maurice, Serbie et Suisse. Un a quitté la liste noire pour la grise : les îles Marshall. En novembre 2019, la Macédoine du Nord a quitté la liste grise, tandis que le Belize y a été déplacé depuis la liste noire.
En février 2020, 17 territoires ont quitté la liste grise : Antigua-et-Barbuda, Arménie, Bahamas, Barbade, Belize, Bermudes, Cap-Vert, Curaçao, Îles Caïmans, Îles Cook, Îles Marshall, Îles Vierges britanniques, Monténégro, Nauru, Niue, Saint-Christophe-et-Niévès et Vietnam. En mars 2019, trois territoires ont quitté la liste noire sans même passer par la liste grise : Aruba, Dominique et les Emirats Arabes Unis.
Pour le Panama, c’est un retour en arrière car il était parvenu, avec le soutien politique de l’Espagne, à sortir de cette liste en mars 2019
A noter que pour la première fois, un territoire britannique y figure. Les îles Caïmans comptent deux fois plus d’entreprises que de citoyens. La plupart n’ont pas de bureau et seulement une boîte aux lettres. Cela envoie un signal clair en cette période de Brexit
La Turquie, elle, évite de justesse ce déclassement, et reste sur la liste grise. Une autre année a donc été donnée à Ankara pour commencer à partager ses données avec les 27 Etats membres.
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