L’opposition droite/gauche a longtemps structuré la vie politique. Elle est aujourd’hui bousculée, et n’apparaît plus suffisante pour organiser la vie politique. La comparaison entre les élections de 1981 et 2017, en est une flagrante illustration : en 1981 l’opposition droite/gauche était frontale ; en 2017, l’échiquier politique est divisé en 4 parts quasi égales !
Pourquoi ?
L’élément essentiel est sans doute la fracture de la droite et de la gauche en multiples droites et gauches, sur plusieurs questions :
- sur l’Europe : il y a des souverainistes dans les deux camps, comme il y a des européens convaincus de droite et de gauche
- Les finances publiques : c’est tout juste si pour certains la dette est un problème et là encore, à droite comme à gauche
- La laïcité divise les deux camps, transformant la conception qu’en avait la loi de 1905
- La décentralisation enfin est aussi une ligne de fracture entre étatistes et girondins, de droite et de gauche.
Un autre élément de mise en cause tient sans doute aussi à l’évolution de nos sociétés. La coupure droite/gauche s’inscrit dans une logique de lutte de classes à une époque où sont bien identifiés la classe des patrons et celle des ouvriers. Aujourd’hui les catégories sociales sont multiples, et leurs frontières sont moins étanches ; les catégories intermédiaires ont pris une place croissante. Le chômage de masse et la précarité créent une coupu entre ceux qui ont un stravail stable et les autres. Et en même temps, la droite et la gauche ont perdu le contact avec les milieux populaires.
Le paradoxe s’accroît quand le libéralisme est de gauche au plan sociétal et de droite au plan économique , et qu’à l’inverse l’étatisme économique serait de gauche et l’étatisme de droite au plan sociétal .
Ces évolutions ont conduit à la radicalisation des extrêmes, à droite comme à gauche, accentuant encore un peu plus les fractures des deux camps, au point que les droites ou les gauches seraient devenues ” irréconciliables”.
On peut ajouter à cela des pratiques politiques qui ajoutent à la confusion, où on refuse une idée, non pas pour ce qu’elle est, mais en raison de son origine ou de l’appartenance de celui qui la porte.
Cela conduit à des alternances successives ou la majorité qui arrive n’a de cesse que de remettre en cause par principe, ce qu’a fait la majorité qui part. Les péripéties des réformes territoriales au cours des deux quinquennats en sont un bon exemple : la gauche dans l’opposition, défend une intercommunalité partagée face à une droite autoritaire, et veut imposer des règles rigides aux territoires une fois au pouvoir, ce que s’empresse de dénoncer alors la droite !
La Liberté serait de droite, quand l’égalité serait de gauche, oubliant qu’on ne peut opposer ces deux valeurs fondamentales de notre république.
Avec le nouveau Président Macron, certains défendent d’ores et déjà une opposition de gauche, ou de droite avant même son action, et avant même d’avoir définit le contenu de ces oppositions.
Le clivage droite/gauche éclaire certains aspects de la vie politique, demeure sur certains thèmes, sur certaines valeurs mais selon l’endroit où l’on met le curseur de cette opposition, la frontière se déplace. Il ne doit pas être nié mais dépassé pour construire une politique pour le pays : c’est le sens de la démarche engagée par notre nouveau Président.
3 Commentaires
C’est une très bonne analyse
Attendons les élections locales où on trouvera bien que le clivage gauche-droite n’a jamais été pertinent
Il faudra rassemblér des femmes et des hommes de bonne volonté par-delà leur appartenance politique
Lors des prochaines élections municipales on peut parier que des villes France insoumise mettre en place la cantine gratuite Et les villes Front national supprimeront la gratuité pour les familles à faible revenu
Entre les autres Villesc’est plus nuancé et moins marqué idéologiquement
La décentralisation ou la recentralisation, le recours à la dette ou son assainissement, pour reprendre deux des éléments forts que tu indiques ne sont pas des objectifs politiques en soi. Ce sont des moyens, des outils, pour conduire le monde (ou simplement notre pays, restons modestes) vers un idéal qui, aujourd’hui en France, paraît consensuel tant qu’on en reste aux mots. C’est le “Liberté, Egalité, Fraternité”, auquel j’ajouterai Laïcité. Mais on ne met pas les mêmes choses derrière ces mots et c’est sans doute là que se trouve le clivage le plus profond.
Ce qui me gêne dans la démarche du “ni droite ni gauche” qu’on appelle aussi “l’addition des compétences”, c’est qu’elle peut tenir tant que l’on reste sur le strict plan de la gestion, y compris quand il s’agit de réformer, mais qu’elle ne tient aussi sans doute que tant qu’elle réussit à occulter le clivage autour de cet idéal vers lequel nous devrions collectivement progresser. Pour prendre une image, c’est comme si on réunissait un quarteron d’expert pour définir la meilleure façon de dérouler du bitume, sans jamais leur préciser où l’on va tracer la route et encore moins où elle doit mener. On en tirera des solutions très élaborées, mais pas de route.
Je crois moi que la question de la pauvreté, celle des inégalités croissantes (En Allemagne par exemple, dont on cite pourtant régulièrement l’excellente santé économique, la pauvreté a considérablement augmenté), la question de l’exploitation, celle de la “valeur” travail confrontée à la rentabilité de la finance, et bien d’autres encore demeurent extrêmement clivantes. On peut les occulter un temps en se concentrant sur une gestion “ni droite, ni gauche” mais ne nous leurrons pas, elles vont demeurer profondément ancrées dans l’inconscient collectif jusqu’à ce qu’elles ressurgissent et fassent encore grimper le thermomètre qu’est finalement le score du Front National … jusqu’à l’explosion
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Sur l’exemple que tu cites , la valeur travail , il y a, à gauche , de profondes fractures comme en ont témoigné les débats sur le revenu universel et la fin (?) du travail , souhaité par certains à droite et à gauche , et rejetté tout autant par certains à droite et à gauche au nom de la valeur de travail (hors de la question de son financement qui est autre chose)