Autriche : Vers le retour d’une coalition de droite Parti populaire et Parti libéral ?

Les élections législatives du 15 octobre sont anticipées d’un an et consécutives à la démission, le 10 mai dernier, du vice-chancelier et dirigeant du Parti populaire (ÖVP), Reinhold Mitterlehner, de toutes ses fonctions. Election importante dans cette partie de l’Europe ou le populisme et le nationalisme sont forts.

Trois partis dominent en Autriche, rappelle une note de la fondation Schuman :

  • – le Parti social-démocrate, SPÖ, fondé en 1889 et conduit par le chancelier sortant Christian Kern, qui compte 52 députés ;
  • – le Parti populaire (ÖVP), parti de centre-droit créé en 1945 et dirigé depuis 14 mai dernier par le ministre sortant de l’Europe, de l’Intégration et des Affaires étrangères, Sebastian Kurz, possède 47 sièges ;
  • le Parti libéral (FPÖ) qui est un parti populiste de droite créé en 1956 et conduit par Heinz-Christian Strache, compte 40 sièges
  • on peut ajouter Les Verts-L’Alternative verte (DG), fondés en 1986 et présidés depuis le 19 mai dernier par Ingrid Felipe, possèdent 24 sièges ; la Team Stronach (TS), parti populiste créé en 2012  compte 11 députés ; et NEOS – nouvelle Autriche (NEOS), parti libéral fondé en 2012  qui possède 9 sièges..

La coalition gouvernementale sortante rassemble le Parti social-démocrate et le Parti populaire. Le  chancelier Christian Kern (Parti social-démocrate, SPÖ), un temps tenté par la conduite d’un gouvernement minoritaire, a accepté l’organisation d’un scrutin législatif anticipé .Il a accusé l’ÖVP de ne pas avoir pas respecté son engagement de janvier 2017 de permettre l’adoption de plusieurs mesures qui auraient à la fois permis à la coalition gouvernementale de se maintenir et fait chuter le nombre des électeurs tentés par le Parti libéral (FPÖ).

 La coalition gouvernementale a également été ébranlée par les arrivées massives de réfugiés.Si la grande majorité de ces réfugiés a continué sa route vers l’Allemagne, environ 90 000 au total ont demandé asile à Vienne, soit l’équivalent de 1% de la population autrichienne.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la vie politique autrichienne est dominée par deux partis : le Parti populaire (ÖVP) et le Parti social-démocrate (SPÖ) qui se sont formés sur deux clivages : la religion (le premier est le successeur du Parti chrétien-social catholique qui était très lié à l’église catholique) et la classe sociale (le deuxième est l’héritier du Parti ouvrier social-démocrate). En 1975, ces deux partis rassemblaient 93,4% des suffrages ; 84,4% en 1983 mais seulement les deux tiers de l’électorat (66,4%) en 1995 et tout juste la moitié (50,8%) lors des dernières élections du 29 septembre 2013. Par ailleurs, pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les candidats des deux partis au pouvoir ont été éliminés de la course présidentielle dès le premier tour de l’élection présidentielle du 24 avril 2016.

Dans les années 1980, deux phénomènes ont modifié le paysage électoral autrichien : l’apparition de nouveaux partis (notamment Les Verts) et la renaissance d’un ancien parti, longtemps demeuré minoritaire, le Parti libéral (FPÖ), créé en 1956. Conséquence : les deux ” grands ” partis se sont affaiblis, leurs effectifs ont fondu et le nombre de suffrages qu’ils recueillaient a décru. La baisse de la participation électorale a encore accru cette tendance
L’Autriche fonctionne sur le principe du Proporzsystem, système corporatiste fondé sur le compromis et le partage du pouvoir entre les deux principaux partis ainsi que sur la coopération entre les syndicats et le patronat.

Une chose est sûre : la coalition sortante ne devrait pas être reconduite à l’issue du scrutin législatif du 15 octobre. Chacun des deux partis a indiqué ne pas vouloir poursuivre la collaboration.

Selon la dernière enquête d’opinion, l’ÖVP arriverait en tête avec 35% des suffrages. Il devancerait le Parti libéral (FPÖ), qui recueillerait 25% des voix, et le SPÖ, qui obtiendrait 24% des suffrages. Les Verts-L’Alternative verte, NEOS la nouvelle Autriche (NEOS), parti libéral dirigé par Matthias Strolz, et la Liste Peter Pilz recueilleraient chacun 5% des voix. Au vu de ces intentions de vote, une coalition gouvernementale rassemblant l’ÖVP et le FPÖ et dirigée par Sebastian Kurz semble l’option la plus probable.

Le renouveau du Parti populaire (ÖVP) est en cours avec Sebastian Kurz, 31 ans, le plus jeune candidat au poste de chancelier de l’histoire autrichienne. Beaucoup de nouvelles personnalités figurent sur les listes présentées par l’ÖVP, y compris certains non membres du parti et soutenues par d’autres organisations.

 L’ÖVP se transforme à la fois en organisation classique et plateforme ouverte. Sebastian Kurz a fait de l’ÖVP un parti à sa mesure et il veut casser le système en profitant de sa jeunesse. Il n’a pas d’offre idéologique précise et reste très mobile pour dépasser les clivages traditionnels. Mais Sebastian Kurz, représentant de l’aile droite de l’ÖVP, est favorable à un durcissement de la politique migratoire. Il souhaite notamment faire cesser les migrations économiques et accroître les contrôles aux frontières extérieures de l’Union européenne. Il   occupe le créneau du Parti libéral, à savoir l’arrêt de l’immigration et tente de couper l’herbe sous le pied des populistes.

 Le FPÖ peut se rassurer en constatant que les questions de l’immigration et de l’asile restent au cœur des débats politiques de la campagne électorale. Les chances pour le parti populiste de siéger au sein du prochain gouvernement n’ont sans doute jamais été aussi grandes depuis plusieurs années. En revanche, celles pour son dirigeant d’accéder à la chancellerie demeurent très minces. Le président de la République Alexander van der Bellen a d’ailleurs indiqué qu’il ne nommerait jamais Heinz-Christian Strache au poste de chancelier même si son parti arrivait ne tête du scrutin législatif.

Le Parti social-démocrate autrichien a perdu les deux tiers de ses membres et la moitié de ses électeurs au cours des 30 dernières années. Même si ses responsables peinent à le reconnaître, le SPÖ a indéniablement ” droitisé ” son discours et son action, sauf en ce qui concerne les sujets de société. Le 14 juin dernier, le parti a même ouvert la porte à une alliance avec le FPÖ, option qu’il s’est toujours interdit au cours des 30 dernières années.Le chancelier sortant a admis qu’une coalition avec les Verts-L’Alternative verte et NEOS la nouvelle Autriche (NEOS), parti libéral dirigé par Matthias Strolz, représentait sans doute la meilleure option à ses yeux même si celle-ci lui semble assez peu probable.

Christian Kern fait campagne sur le thème de l’emploi plutôt que sur celui de l’immigration. Il met en avant la reprise de la croissance de l’économie autrichienne après six années difficiles. Il affirme avoir créé 63 000 nouveaux emplois au cours des 12 derniers mois, soit davantage qu’en Allemagne. Il a également souligné que 300 entreprises internationales s’étaient installées en Autriche, où le taux d’investissement (privé et public) est supérieur de 3 points à celui de l’Allemagne. Le chancelier sortant veut réduire de plus de 5 milliards € les impôts et les contributions sociales des particuliers et des entreprises. Il pense financer cette mesure par une augmentation des taxes sur les entreprises internationales et sur l’héritage

Le système politique autrichien

Le parlement autrichien est bicaméral. La chambre basse, le Conseil national (Nationalrat), regroupe 183 députés élus pour 5 ans ; la chambre haute, le Conseil fédéral (Bundesrat), rassemble les 64 représentants des neuf Länder du pays.

Les membres du Conseil national sont élus au scrutin majoritaire à Vienne comme dans le Land du Vorarlberg et au scrutin proportionnel au sein des 7 autres Länder divisés en 43 circonscriptions locales. Chacune des régions désigne entre 7 et 36 députés. Chaque électeur dispose de deux voix : l’une pour se prononcer au niveau national en faveur d’un parti et l’autre pour désigner au sein d’une circonscription locale un candidat en particulier.

Le Bundesrat représente les Länder. Chaque Land est administré par un gouvernement (Landesregierung) et une Diète (Landtag). Les Länder sont compétents dans tous les domaines ne relevant pas expressément de l’Etat fédéral : aménagement du territoire, protection de l’environnement, occupation des sols, transports. Chaque Land désigne un nombre de représentants proportionnel à sa population

Rappelons que les Autrichiens élisent également leur président de la République au suffrage universel direct. Alexander Van der Bellen a remporté l’élection présidentielle qui a eu lieu dans le pays en 2016. Le candidat écologiste qui se présentait en indépendant a recueilli, lors du deuxième tour de scrutin du 4 décembre 2016, 51,7% des suffrages contre 48,3% des voix à son adversaire populiste Norbert Hofer (FPÖ).

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