Face au vieillissement de la population, que faire et comment financer la dépendance ?

Cette question devient un enjeu politique essentiel et l’actualité le rappelle régulièrement. Mais il faut des financements: Âge de départ à la retraite, hausse de la durée de cotisation, nouvelles journées de solidarité… plusieurs options sont sur la table de l’exécutif pour financer la prise en charge du grand âge et de la perte d’autonomie. Une vaste concertation a été lancée à l’automne sur le sujet, donnant lieu, il y a plusieurs semaines, à la remise du rapport Libault.

La facture à régler est lourde: 10 milliards d’euros par an de besoin de financement, à horizon 2035. La seule certitude aujourd’hui est qu’on ne peut financer cette dépense que par le travail : recul de la borne légale de départ à la retraite,  nouvelle hausse de la durée de cotisation pour prétendre à une retraite à taux plein (elle est programmée pour atteindre 43 annuités en 2035 suite à la réforme Touraine de 2014) ou l’accélération du rythme de son relèvement (un trimestre supplémentaire tous les trois ans à compter de 2020), mais il existe aussi des pistes, déconnectées de la seule fin de carrière, qui portent davantage sur le temps de travail : créer une ou plusieurs journées de solidarité comme cela a été fait sur le lundi de pentecôte qui rapporte 2,3 milliards d’euros par an au financement de la dépendance en France.

Ou alors, pour réorienter vers la perte d’autonomie le milliard et demi d’euros de rendement annuel de la CRDS servant aujourd’hui à rembourser la dette sociale et dont l’extinction est prévue pour 2024… Mais aussi  Suppression de jours de RTT, révision des forfaits jours ou autres dispositifs d’annualisation du temps de travail que les entreprises ont mis en place depuis 2008 pour contourner la réduction uniforme du temps de travail imposée par les lois Aubry au début des années 2000…

Dans  son rapport sur le « grand-âge et l’autonomie », à la demande de la Ministre des solidarités et de la santé, Dominique Libault dresse un constat étayé et formule 175 propositions pour envisager une réforme ambitieuse (voir aussi le dossier de presse)

La Fédération Hospitalière de France (FHF) salue la prise de conscience de l’exécutif, de l’impérieuse nécessité de faire du grand âge un enjeu majeur pour l’avenir de notre pays.

Elle affirme ses cinq priorités pour répondre aux attentes et préoccupations des Français. 1. Engager un « changement de logiciel » de l’aide aux aînés : Quels que soient leurs troubles somatiques ou cognitifs, il faut construire une offre correspondant aux attentes des personnes âgées reposant prioritairement sur la prévention, le maintien des liens sociaux et le maintien de l’autonomie. Pour avancer vers cet objectif, il faut résolument décloisonner l’offre entre domicile, établissements sanitaires et médicosociaux en donnant beaucoup plus de libertés aux acteurs du secteur pour faire évoluer leur réponse en fonctions des besoins et des spécificités de chaque territoire. Cette mutation supposera un plan ambitieux d’investissement dans l’immobilier (penser les structures dans une logique « domiciliaire », diversifier les formes d’hébergement dans une optique de maintien du lien social et d’ouverture vers la cité) et les nouvelles technologies (système d’information, domotique et télé-soin).

 2. Engager une « révolution des métiers » : La loi Grand-âge et autonomie doit être l’occasion de développer de nouveaux métiers de la dépendance et de revaloriser de manière décisive les carrières des professionnels (revalorisations salariales progressives, refonte et renforcement de la formation initiale et continue, renforcement du plan qualité de vie au travail).

3. Engager le « renforcement des effectifs » : Un signal clair sur le renforcement des moyens humains dans les établissements comme dans les services est très fortement attendu par les professionnels mais aussi par l’ensemble de la population qui a pleinement conscience de la pénurie de moyens.

4. Engager un « bouclier hébergement » : Il faut plafonner le reste à charge aux ressources des personnes âgées : aujourd’hui le reste à charge dépasse de 300 à 500 euros par mois les ressources des personnes âgées. Demain, personne ne doit se voir facturer plus qu’il ne peut payer avec ses revenus.

5. Engager « Un budget à la hauteur des enjeux » : La FHF estime que, pour bâtir un socle solidaire pour l’autonomie, un budget de 10 milliards d’euros est nécessaire. Pour financer ces objectifs (reste à charge, développement et transformation de l’offre, renforcement des effectifs et attractivité des métiers) un consensus existe sur la nécessité de dégager à horizon 3/5 ans au moins 10 milliards d’euros de financement publics nouveaux.

  La FHF réclame que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que les ressources aujourd’hui nécessaires au remboursement de la dette sociale (15 milliards d’euros) soient progressivement affectées au plan autonomie grand âge. En effet, l’extinction de la dette sociale à horizon 2024 devrait ainsi permettre de contribuer au financement d’une cinquième branche / risque de la Sécurité sociale que la FHF préconise de créer avec un socle public majoritaire, national, égalitaire et solidaire.

 L’Association des Maires de France, salue dans un communiqué , « le travail accompli » et « la densité des propositions » formulées par Dominique Libault qui « correspondent à ses attentes » et à certaines de ses « préconisations ». Elle insiste, toutefois, pour que « les objectifs qui seront retenus par le gouvernement s’appuient sur des financements dédiés, et non sur les budgets communaux aujourd’hui plus que  jamais contraints ».

L’AMF rappelle, en effet, que communes et intercommunalités disposent déjà de « moyens très limités » et « ne peuvent faire face, seules, à la montée en puissance des demandes », bien qu’elles jouent un « rôle majeur » dans l’inclusion sociale des personnes âgées, l’accès aux droits, la coordination des acteurs ou encore le développement d’une offre de mobilité ou de logements adaptés. Elles gèrent également des services d’aides et d’accompagnement à domicile (SAAD) et des établissements avec ou sans hébergement, et nombre d’entre elles proposent des aides financières aux personnes âgées.

Voir aussi « les grandes attentes face à la dépendance » de julien Damon

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