Avr 02

Aux origines de l’insurrection syrienne

Arton2583-a8c6fLa guerre civile en Syrie entre dans sa quatrième année et son bilan ne cesse de s’alourdir. Dans son ouvrage consacré au régime autoritaire de Bashar al-Asad, S. Belhadj montre que ce conflit n’est pas d’ordre communautaire, mais qu’il naît d’un conflit social profond. C’est le point de vue que résume fort bien Leila Vignal dans une note de la vie des idées.

Souhaïl Belhadj fait en effet œuvre à la fois de politologue et d’historien du contemporain. En politologue, il procède à une véritable anatomie d’un régime autoritaire, pour reprendre le sous-titre qu’il a choisi, et en particulier à une anatomie des institutions et des systèmes de pouvoir qui lui ont permis de se maintenir depuis 40 ans.

Il fait également œuvre d’historien en offrant au lecteur une synthèse de plus soixante ans de vie politique syrienne, analysée à partir du fil rouge qui, selon lui, est à l’origine du régime autoritaire syrien et de la formule si singulière de «leadership » qu’il a créé. Ce fil rouge est l’existence d’un conflit social qui oppose différents groupes en compétition pour l’exercice et la participation à l’ordre politique dans la Syrie de l’indépendance.

L’ordre politique fondé par Hafez al-Asad et perpétré par son fils Bashar a donc été celui de «l’instauration d’un système coercitif et clientéliste qui préserve les équilibres communautaires », impliquant la limitation du pluralisme politique et la perpétuation d’une « politique avantageuse pour l’armée, le Ba’th et la minorité alaouite ».

Souhaïl Belhadj montre que, sous couvert de protéger un ordre multiconfessionnel, et tout en se présentant comme le défenseur des minorités, le régime des Asad a, tout au contraire, renforcé les antagonismes de toute nature qui traversent la société syrienne : antagonismes de type ethno-religieux, communautaires, et de classe. Plutôt que de libéraliser le jeu politique et de prendre le risque de se voir mettre en minorité, la direction politique syrienne, de Hafez à Bashar al-Asad, a préféré geler le conflit social en mettant en place la « formule autoritaire ba’thiste ».

La Syrie de Bashar al-Asad, Anatomie d’un régime autoritaire, de Souhaïl Belhadj, Belin, 2013, 464 pages, 25€

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