«Bonne» ou «mauvaise» finance : il faut choisir !?

finance2Ainsi, comme pour le cholestérol, il y aurait la bonne et la mauvaise finance!. Michel Sapin, le Ministre des Finances de Manuel Valls, vient de déclarer : « Notre amie, c’est la finance, la bonne finance ». Une déclaration qui, selon l’AFP, aurait « déclenché des rires dans la salle » lors des Rencontres économiques d’Aix-en Provence, le dimanche 6 juillet.

Cette vision manichéenne de la finance dans le débat public ne peut qu’égarer un peu plus encore nos concitoyens! Elle participe d’une instrumentalisation médiatique, malsaine. Un militant, Jean Claude Branchereau, m’a transmis une « réaction que je trouve intéressante et que je vous soumets.

« C’est en réponse à sa propre question « Y-a-t-il une finance heureuse, au service d’investissements heureux ? » que Michel Sapin a répliqué qu’il pouvait y avoir une « bonne finance ». Il prenait ainsi le contre-pied de François Hollande qui, lors de son discours du Bourget, en 2012, n’avait pas fait de détail en affirmant « Mon ennemie, c’est la Finance ! ».

Cette finance à la fois bonne et heureuse serait, si l’on en croit Michel Sapin, celle qui finance les investissements aux entreprises et aux ménages. Elle ne pèserait donc pas bien lourd à côté de la mauvaise. Lors du débat sur la « Loi bancaire » de Pierre Moscovici, en 2013, Gaël Giraud, chercheur au CNRS et à l’École d’Économie de Paris, avait précisé ce qu’il en était des activités des banques utiles à l’économie » : « Aujourd’hui, sur 8 000 milliards de total de bilan bancaire français, seuls 10 % servent au financement des entreprises. Et 12 % au financement des ménages. Le reste ce sont des opérations de marché ». Soit, 22 % de bonne finance et 78 % de mauvaise !

Le constat ne s’arrête malheureusement pas là. Lors de la dernière crise bancaire, la « mauvaise finance », dont Michel Sapin reconnait qu’elle « a été à l’origine en grande partie de la crise de 2008-2009 » avait chassé la bonne et les banques n’accordaient plus aucun crédit. Le crédit interbancaire lui-même avait sombré corps et biens car les banques n’osaient même plus se faire crédit entre elles. Sans l’aide massive des États de l’Union européenne qui a contribué à gonfler lourdement leurs dettes publiques (1 616 milliards d’euros versés par les États de l’Union européenne entre 2008 et 2011, selon la Commission européenne « Rapport sur les aides d’État accordées par des États-membres de l’Union européenne » ), le crédit à l’économie, « aux investissements heureux », aurait purement et simplement disparu, en même temps que le système bancaire.

La mauvaise finance a-t-elle, pour autant, été régulée depuis 2008 ? Michel Sapin affirme que, de ce point de vue, « le chemin parcouru est considérable ». De quel chemin peut-il bien s’agir ? La loi bancaire du 26 juillet 2013 qui devait mettre en application le 7ème engagement de François Hollande : « séparer les activités spéculatives des banques de celles qui sont utiles à l’investissement », n’a rien séparé du tout. De l’aveu même du PDG de la Société Générale, lors de son audition par la Commission des finances de l’Assemblée Nationale, cette loi cantonne moins de 1,5 % des activités bancaires dans des filiales spécifiques.

Ce n’est que dans l’imagination florissante de Michel Sapin que la bonne finance est séparée de la mauvaise. Comme en 2008, la mauvaise finance risque à tout moment de déclencher une nouvelle crise bancaire et de chasser la bonne car rien n’a été fait pour l’en empêcher, la loi bancaire de 2013 ayant été écrite sous la dictée du lobby bancaire. »

J’avais évoqué déjà ici cette nécessaire isolement des activités spéculatives .

 

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