A l’heure où les postes stratégiques du gouvernement autrichien sont occupés par un mouvement d’extrême droite, la question se pose de la meilleure manière d’y faire face. Un boycott institutionnel est-il possible ? Techniquement, il s’agirait d’une sorte de mise en oeuvre informelle de l’article 7 des traités sans en suivre la procédure. Si il serait symboliquement pertinent d’ « oublier » le tour de l’Autriche à la présidence de l’Union, il semble délicat d’écarter ses ministres des discussions techniques du Conseil. Nous reproduisons cependant ici la prise de position en ce sens de l’EGAM pour nourrir le débat.
Dans cette tribune au « Monde », un collectif – comprenant notamment Benjamin Abtan, Bernard Kouchner, Beate et Serge Klarsfeld – appelle les leaders européens à « la mise au ban de l’Europe de ce gouvernement autrichien ».
” Ne détournons pas les yeux : ce sont bien les héritiers du nazisme qui sont entrés en position de force dans le nouveau gouvernement autrichien. Nous sommes tous concernés, car nous sommes tous menacés par leur funeste idéologie de haine. La démocratie et l’Europe font face à un nouveau coup de boutoir, qui pourrait leur être fatal. C’est une étape dangereuse.
Pourtant, c’est dans un silence et une apathie coupables que les chancelleries comme la rue ont accueilli cette nouvelle.
Nous refusons l’idée selon laquelle la progression du nationalisme et la fin de la démocratie seraient une fatalité, et l’action contre les héritiers du nazisme, inutile voire illégitime. Au contraire, nous pensons qu’il est de la responsabilité éthique, citoyenne et politique de tous de se confronter résolument à eux.
C’est pourquoi nous appelons à la mise au ban de l’Europe de ce gouvernement autrichien. En pratique, cela signifie que les ministres autrichiens d’extrême droite ne doivent être reçus par aucun de leurs homologues européens, qui ne doivent participer à aucune réunion ou rencontre avec eux.
Cela signifie également le boycott par les chefs d’Etat et de gouvernement de la présidence autrichienne du Conseil de l’Union européenne, entre le 1er juillet et le 31 décembre 2018.
Ce n’est pas en laissant se déployer avec permissivité les idéologies qui ont amené à sa destruction que l’avenir de l’Europe peut être bâti, mais en combattant vigoureusement pour ses valeurs humanistes fondamentales. Il en va de la nature de notre destin partagé.”
Appel lancé par Benjamin Abtan, président du mouvement antiraciste européen (EGAM), et Bernard Kouchner, ancien ministre français des affaires étrangères. Les autres signataires : Beate et Serge Klarsfeld, dirigeants des Fils et filles des déportés juifs de France, ambassadeurs honoraires…
Commentaires récents