Une étude intéressante de l’INED compare les évolutions de la population des onze pays de l’Est ayant rejoint l’Union européenne dans les années 90, avec celles observées dans les dix-sept autres pays de l’Union. Une évolution porteuse de nouveaux déséquilibres dans les années à venir
Les onze pays anciennement communistes (Bulgarie, Croatie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovaquie et Slovénie) ont connu une diminution de leur population et un vieillissement démographique rapide depuis 1989. Ces évolutions tiennent à un faible niveau de fécondité et à une émigration importante des jeunes.
En 2018, ces onze pays comptaient ensemble 103 millions d’habitants, soit 20 % de la population totale de l’Union européenne. Près de trente ans plus tôt, en 1989, ils étaient 111 millions, soit 23 % de l’ensemble des 28 pays (qui n’étaient pas encore tous membres de l’UE à l’époque). Depuis 1989, la population de ce groupe de onze pays a donc baissé de 7 %.
Cette tendance à la baisse de la population dans ces pays contraste nettement avec ce qui a été observé dans le reste de l’UE, dont la population a globalement augmenté de 13 %, même si elle a récemment légèrement diminué dans les pays méditerranéens (Espagne, Grèce, Italie et Portugal).
Les deux composantes du changement démographique, le mouvement naturel (différence entre les naissances et les décès) et le mouvement migratoire (différence entre les entrées et les sorties de migrants), ont toutes deux contribué au déclin de la population de ces 11 pays.
Le solde migratoire est le facteur principal, responsable des trois quarts de la baisse (73 %), et le solde naturel d’un quart (27 %).
En Hongrie, République tchèque et Slovénie, le solde migratoire a toutefois été positif et a plus que compensé l’excédent des décès sur les naissances, ou a réduit la baisse de la population. Le solde naturel n’a compensé le solde migratoire négatif qu’en Pologne, Slovaquie et Slovénie.
A l’inverse dans les 17 autres pays d’Europe, la population a augmenté sous l’effet conjoint d’un solde naturel positif et d‘un solde migratoire positif. Dans trois pays seulement : l’Allemagne, la Grèce et l’Italie, le solde naturel a été globalement négatif au cours des trente années, mais de façon mineure.
Selon les estimations les plus récentes d’Eurostat, entre 2004 et 2017, le nombre de personnes originaires des pays de l’UE-11 vivant dans d’autres États membres de l’UE a été multiplié par près de cinq pour atteindre environ 8,2 millions.
En termes absolus, les pays qui ont le plus alimenté ces flux sont la Pologne et la Roumanie : en 2017, respectivement 2,5 millions et 3,1 millions de citoyens de ces pays résident dans un autre État membre de l’UE. En termes relatifs, les sorties les plus importantes ont été observées en Roumanie avec 11 % de la population vivant en 2004 dans le pays l’ayant quitté depuis pour s’installer dans un autre État membre de l’UE, ainsi qu’en Bulgarie, en Estonie et en Lituanie (environ 5 % de leur population en 2004).
Mais les différents groupes d’âges n’ont pas été touchés de la même façon. Les personnes relativement jeunes sont les plus susceptibles d’émigrer. Selon Eurostat, près de 70 % de celles établies à l’étranger avaient moins de 40 ans. Dans plusieurs régions de Pologne, plus de 20 % des adultes âgés de 20 à 34 ans ont émigré entre 2004 et 2011 pour rester à l’étranger pendant plus d’un an.
Dans les années 90, l’espérance de vie s’est mise à augmenter et le nombre de décès étant resté relativement, c’est la baisse des naissances, sous l’effet de la diminution de la fécondité, qui a produit un solde naturel négatif dans l’UE-11. Le nombre annuel de naissances dans l’ensemble de l’UE-11 est passé de près de 1,6 million en 1989 à 1,0 million en 2016, soit une baisse de plus d’un tiers.
Trois groupes de facteurs ont joué dans ces évolutions de fécondité dans l’UE-11 ; l’adoption dans toute la société, et particulièrement par les jeunes générations, de valeurs post-modernes qui accordent une priorité aux libertés individuelles et au désir de réalisation personnelle, Le deuxième groupe de facteurs, spécifiques aux pays ex-communistes, est lié à l’austérité économique qui a accompagné la transition vers une économie de marché. Et le troisième groupe est lié au recul de l’État et des politiques sociales qui existaient auparavant
Enfin selon les projections d’Eurostat, vers 2050, les États membres de l’UE comptant les plus fortes proportions de personnes âgées comprendront les pays du Sud de l’Union (Grèce, Italie, Portugal et Espagne), suivis de six pays de l’UE-11 : Bulgarie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie et Slovénie.
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