Les débats publics récents ont souvent évoqué la crise de la démocratie . Ce constat à sa part de vérité mais aussi sa part de malentendu . Sur tout sujet il est normal qu’il y ait des points de vue différents ….et la démocratie, c’est d’en débattre, mais c’est aussi de décider !
On connaît aujourd’hui plutôt une prolifération des lieux de débat et d’expression
C’est la multiplication des sondages, et quoi qu’on en dise leur fiabilité pourvu qu’on sache en apprécier les limites, est un élément d’appréciation de l’opinion qu’on ne peut négliger. Mais il est vrai qu’un sondage peut agréger des opinions différentes, des oppositions multiples, voire contradictoires (cf. récemment la loi travail)!
Internet et les réseaux sociaux accroît la place des pétitions dans les mouvements d’opinion , même si parfois l’identité des signataires peut prêter à contestation : les pétitions récentes sur la loi travail ou sur l’après Brexit, montrent que c’est un outil d’expression qui prend une autre dimension aujourd’hui .
Les référendums prennent une place là aussi accrue dans le débat public ; mais on en voit aussi les limites dans les exemples récents: à Notre dame des Landes on discute de la légitimité des participants , et on en arrive à « vouloir uniquement un référendum s’il vous donne raison » dire ” comme le dessine avec humour Xavier Gorce. En Angleterre, beaucoup de citoyens semblent découvrir après coup , une réalité , des conséquences qu’ils n’avaient pas envisagées.
On peut multiplier ces outils de débat, d’échange , développer les occasions de débat public, renforcer les outils d’évaluation , alors que tant de lois sont adopter sans véritable évaluation de leurs effets, mieux mesurer les impacts financiers. Mais la démocratie , ce n’est pas que débattre, c’est malgré tout à un moment donné, de décider!
La multiplication de ces outils ne doit donc pas ignorer la place des institutions démocratiques dans le processus décisionnel. A elles, et à elles seules, de le conclure, avec les informations nécessaires , avec la légitimité qui est la leur, dans une République.
Pour cette légitimité, deux aspects sont essentiels :
Que leur mise en place soit portée par le maximum de citoyens , et ceci ramène à l’importance capitale de la participation électorale
Que soit respecté le principe de base “un homme, une voix”, garant de l’intérêt général : le référendum sur le Brexit a fait émerger à cet égard l’idée surprenante que les jeunes devraient avoir plus de poids que les retraités, car il s’agirait de l’avenir ! Mais toute décision engage l’avenir ! Et pourquoi pas revenir au régime censitaire en ne faisant voter que telle ou telle catégorie sociale !
En tout cas n’oublions jamais qu’une démocratie vivante , c’est une démocratie où l’on débat , mais c’est aussi une démocratie où l’on décide , car l’action publique doit toujours choisir entre des positions différentes ou contradictoires . La démocratie participative est indissociable de la démocratie représentative !
1 Commentaire
Votre argumentaire pourrait emporter l’adhésion si la puissance publique respectait strictement les procédures instituées dans la plupart des dossiers qui font débat : étude faune-flore complètement bâclée (et remise avant d’avoir été effectuée), expertise de la DGAC bourrées d’erreurs grossières, non conformité avec la loi sur l’eau, procédure d’infraction ouverte par la commission européenne pour Notre-Dame-des-Landes, ou encore déclaration d’utilité publique annulée par le tribunal administratif de Toulouse pour le barrage de Sivens…
On retrouve ici bon nombre de maux français :justice sans moyens, donc particulièrement longue, les décisions désavouant parfois les tutelles à posteriori, mêmes personnes à la tête de l’agence de l’eau et du département (cumul des responsabilités) empêchant tout débat contradictoire, voire travaux engagés sans respecter les délais légaux.
Michel Rocard dont vous louiez fort justement l’intégrité, n’a jamais à ma connaissance recouru a de tels expédients pour forcer la décision. La contestation de nombre de décisions est peut-être à mettre en parallèle avec cet affaiblissement de la rigueur dans la gestion de la chose publique.