Le Gouvernement a dévoilé fin mars la liste des cent "laboratoires d'excellence" (dits "labex"), un des projets phares du grand emprunt. Déclinaisons emblématiques d'une valeur "excellence" dont la répétition ad nauseam semble seule faire office de stratégie au sein du Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, les "labex" font s'interroger la communauté universitaire et scientifique sur les critères de leur sélection et leur mode de financement, révélateurs d'une appréhension simpliste des réalités du monde de la recherche.
Une telle politique trahit une absence de vision et une volonté de déstabilisation de l'ensemble du
système de recherche français, alors même que le renforcement des structures existantes semble prioritaire. Aucune perspective d'aménagement du territoire , ni de concertation avec les Régions dont on sait pourtant qu'elle participe de plus en plus au financement de la recherche, à travers les contrats de projet pour lesquels l'Etat a de plus en plus de mal à tenir ses engagements
Les premiers retours des appels d’offre « investissements d’avenir » (nouveau nom du grand emprunt) concernant la recherche publique font s’interroger la communauté universitaire sur l’existence d’une véritable stratégie au sein du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Nous nous intéresserons ici, à travers cette note de Terra Nova, plus particulièrement au cas des « laboratoires d’excellence » (les « labex »), déclinaison emblématique de cette valeur « excellence » répétée ad nauseam. La finalité des labex devrait être, en théorie, de financer massivement un petit nombre de laboratoires publics supposés particulièrement performants. Outre l’impression, au moins partiellement justifiée dans les faits, que cette augmentation de crédits procède en partie de redéploiements budgétaires au détriment de la grande majorité des laboratoires, cette première sélection laisse un goût amer non seulement aux recalés mais même aux bénéficiaires.
Le flou concernant les critères de sélection des 100 Labex retenus, faisant la part belle à divers lobbyings (aménagement du territoire, mandarinats tenaces, redécoupage arbitraire de laboratoires), montre que l’« excellence » est une notion qui se prête mal à un tel pilotage à vue.
Pire : on peut craindre que cette politique ne soit une tentative délibérée de déstabilisation de l’ensemble du système de recherche, uniquement dans le but de faire bouger ce milieu supposé irréformable. Une autre politique doit remplacer cette mise en concurrence par le renforcement de structures de collaboration, et par une politique de financement des laboratoires existants, basée sur des objectifs clairs, des critères d’évaluation transparents, et où l’« excellence » ne serait pas un label pour une minorité, mais un objectif commun.
Voir aussi la note du syndicat national des chercheurs sur ce sujet
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