Alors que certains cheminots se mobilisent contre le projet de réforme de la SNCF, plusieurs personnalités ont dénoncé une privatisation qui répondrait aux exigences de l’Union Européenne. Ainsi pour Julien Dray, « La réforme, c’est la privatisation du service public demandée par l’Europe ».
La privatisation n’est pas à l’ordre du jour : la SNCF est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) et la réforme prévoit d’en faire une « société nationale détenue à 100% par l’Etat, et dont les titres seraient incessibles ».
Ainsi, tous les concurrents européens de la SNCF sont sous un statut juridique équivalent à la société anonyme, tout en étant pour la plupart des entreprises publiques.
La Commission européenne, estime , contraire au droit de l’Union européenne pour les activités mises en concurrence, la forme juridique d’établissement public, qui ne peut faire faillite et donc dispose d’une garantie illimitée octroyée par l’État incompatible avec le marché intérieur, et d’ un certain nombre de financements
La commission européenne ne réclame pas la privatisation de la SNCF mais le changement de son statut pour être conforme à l’ouverture à la concurrence déjà décidée.
L’Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires Et Routières (ARAFER) a fait un bilan de l’ouverture à la concurrence
Il en ressort que lorsque les pays européens ont utilisé l’ouverture à la concurrence comme un instrument visant à relancer le transport ferroviaire de voyageurs, cet instrument a, de manière générale, porté ses fruits et contribué à une amélioration parfois spectaculaire de l’offre, des performances, de la qualité de service et du prix payé par l’usager. L’ouverture à la concurrence reste un simple levier qui ne saurait à lui-seul résoudre les difficultés que connaît le transport ferroviaire.
Pour autant, elle peut, accompagnée de la mise en place de mécanismes appropriés et d’une régulation qui contribue à lever les obstacles à l’entrée et fournit au marché de la prévisibilité, contribuer à créer un environnement véritablement incitatif pour les fournisseurs de services de transport. Enfin, les effets de l’ouverture à la concurrence ne se réduisent pas à une baisse des coûts des services de transports conventionnés ou à une baisse des prix des services commerciaux. Elle peut permettre aux usagers et clients des services de transport ferroviaires de disposer d’un choix plus large au sein des services ferroviaires (pour les services commerciaux), d’un accroissement de la qualité du service de transport rendu (fréquence, ponctualité, etc.) et, de manière générale, de bénéficier d’un processus d’innovation constant.
La SNCF profite déjà à plein de l’ouverture à la concurrence… mais à l’étranger. « Un tiers du chiffre d’affaires de la SNCF est aujourd’hui réalisé à l’international, a rappelé Guillaume Pepy. La SNCF est présente dans 120 pays. le chiffre d’affaires réalisé à l’étranger en 2017 s’élève à près de 10,8 milliards d’euros sur un chiffre d’affaires total de 33,5 milliards. Il y a dix ans, l’international ne représentait que 12% de l’activité de la SNCF qui veut atteindre 50% de son activité en dehors de la France.
Enfin Pour qu’un train roule en sécurité, il y a 3 fonctions essentiels : le conducteur, le contrôleur, l’aiguilleur. La RATP a déjà remplacé le contrôleur et le conducteur par une machine, sans drame, ni pour les usagers ni pour les personnels. L’évolution du métier de cheminot est inévitable et l’exemple de la poste ou des chauffeurs de taxis montrent qu’il vaut mieux anticiper que de se bloquer sur des situations. La question du numérique est inévitable comme l’ouverture au monde : ne pas s’y préparer serait suicidaire pour les futures générations
Pour aller plus loin :
Damien Adam (LREM), Député de la 1re circonscription de la Seine-Maritime- Rapporteur pour avis du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire : « Réforme de la SNCF : et si on parlait enfin du fond ? »
Rapport de l’ARAFER sur l’ouverture à la concurrence
2 Commentaires
Dominique, comment peux tu véhiculer des éléments qui montrent une méconnaissance de l’entreprise? En matière de sécurité, de la place des nouvelles technologies, de l’état des infrastructures, du fret ouvert à la concurrence depuis 2003, de la dette de l’état… Et puis, oublier la régionalisation ferroviaire, réforme acceptée et positive faite avec les cheminots, les usagers et les collectivités territoriales montrent que la mutabilité d’un grand service public est possible. A moins que tu relayes les éléments de langage idéologique et marketing d’un Damien Adam qui méconnaît, lui, les réalités d’un PAI ou PRCI, le groupe 5 à St Lazare, les fibres optiques déployées par la SNCF et utilisés par SFR, la maintenance des locomotives, la régulation des trains, le nombre de PN et d’ouvrages d’art, les 100 métiers de cheminots et la désintégration de la polyvalence et de la socialisation du travail… Qui fait porter le chapeau aux cheminots de ce qu’est devenu la SNCF. Vraiment déçu de cet article qui n’invite pas à la négociation mais au combat pour rejeter la casse de cette belle entreprise publique déjà bien engagée avec Sarkozy et Hollande dont la ligne Paris Rouen Le Havre en est un bien mauvais exemple, “la dette” de Pépy. Au lieu de s’en prendre aux cheminots, il faudrait plutôt s’attardait aux décideurs , Etat et Pépy, qui aboutit à cette dégradation constatée et mal vécu par les usagers, les collectivités territoriales, les habitants (les camions… ) en général et les cheminots. L’exigence sociale et l’urgence environnementale méritent mieux que la fuite en avant libérale qui nous met tous dans le mur.
Auteur
Je ne vais évidement pas engager une discussion sur ce vaste sujet, ici : je regrette que le débat public soit impossible, certains représentants des cheminots préférant envahir ou empêcher toute réunion publique à ce sujet, tenues par des personnes qui ne partagent pas toutes leurs options. Par ailleurs l’évolution de la SNCF ne peut pas relever du seul choix des cheminots : tous les citoyens ont le droit d’avoir leurs points de vue . L’ouverture à la concurrence est une donnée incontournable aujourd’hui et l’entreprise publique doit s’y préparer ; ce n’est ni sa “casse” ni sa “privatisation” ! En tout cas rien dans mon billet ne fait porter le chapeau des difficultés aux cheminots !